In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Introduction Diane-Gabrielle Tremblay L’analyse des temporalités sociales, temps de travail, temps parentaux, temps de loisir et autres, a suscité de plus en plus d’intérêt au cours des dernières années, alors que l’articulation de ces diverses temporalités soulève souvent des questions , voire très souvent aussi diverses difficultés. On observe par ailleurs des degrés de perméabilité variables entre les temporalités associées aux sphères professionnelle, familiale, de loisir, de parentalité ou autres et cette porosité est aussi la source de questionnements dans la recherche. En effet, les sphères professionnelle et familiale ou personnelle, en particulier , ne peuvent plus être considérées comme des domaines indépendants, mais sont bien des domaines interdépendants (Tremblay, 2012a, 2012b), d’où l’interpénétration des temporalités et les difficultés souvent observées sur ce plan. Ainsi, ce qui se produit dans l’une des sphères aura inévitablement des répercussions dans l’autre. Les recherches indiquent bien que les divers milieux et temps de socialisation constituent un système, mais celui-ci est constitué de sous-systèmes, à savoir les sphères ou sous-systèmes professionnel, familial, parental, personnel et social, qui peuvent être vus comme des sphères autonomes mais qui sont aussi, simultanément, très étroitement liés (Tremblay, Grodent et Linckens, 2011; Grodent et Tremblay, 2013). Un changement dans une sphère influe nécessairement sur l’autre, d’où la nécessité de rechercher un arbitrage ou une meilleure articulation entre ces différents sous-systèmes ou temporalités sociales. Pour certains auteurs, dont Campbell Clark (2001), les frontières entre les différents domaines de la vie peuvent être plus ou moins perméables ou flexibles selon les personnes ou les catégories professionnelles. Cette auteure définit la perméabilité comme le degré auquel des composantes d’un domaine pénètrent dans l’autre sphère et Campbell Clark distingue trois formes de frontières ou de perméabilités: spatiales, temporelles et psychologiques (cité dans Tremblay et Genin, 2008a, 2008b). 2 Temporalités sociales, temps prescrits, temps institutionnalisés Une frontière spatiale, comme les murs d’un bureau ou d’une maison, définit l’espace où l’on adopte des comportements relatifs à un domaine. Une frontière temporelle détermine quand ces comportements doivent être adoptés (horaires de travail par exemple). Une frontière psychologique est un ensemble de règles élaborées par les individus pour déterminer les émotions, les attitudes et les comportements appropriés à chaque domaine (Campbell Clark, 2001, cité dans Tremblay, Grodent et Linckens, 2011). Il en découle trois types de perméabilités: • la perméabilité spatiale, par exemple le fait d’avoir un bureau dédié à son activité professionnelle à domicile, en plus du bureau dans l’entreprise, ce qui est par contre très rare chez les groupes que nous étudions ici; • la perméabilité temporelle, par exemple le fait de travailler en dehors des horaires «normaux» (le soir, les week-ends, etc.), que nous retrouverons surtout chez les travailleuses sociales; • la perméabilité psychologique, qui renvoie à une forme de débordement (spillover). Compte tenu de l’importance des heures de travail, mais aussi d’autres temporalités qui interviennent dans l’articulation entre vie personnelle et vie professionnelle (Johnson et al., 2001; Marshall, 1994), on constate qu’il existe souvent un débordement négatif du travail sur la famille. Cependant, ce débordement peut aussi être positif (voir la théorie de l’enrichissement, Kirchmeyer, 1992; Tremblay, 2012b). L’idée d’enrichissement mutuel entre travail et «horstravail » est ancrée dans le modèle de l’expansion (Marks, 1977), qui soutient que l’articulation entre la vie personnelle-familiale et la vie professionnelle conduit davantage à un enrichissement de la personne qu’à des difficultés et des effets négatifs. Ce sont là deux thèses concurrentes, et selon les catégories professionnelles, la situation peut vraisemblablement être différente (Tremblay, 2013, 2012a), la flexibilité étant également différenciée selon la profession (Marquis et Fusulier, 2008). Bien que cela ne constitue pas la seule approche considérée ici, l’entrée par la profession, ou l’analyse d’un groupe professionnel donné, permet de comprendre comment les professionnels d’un domaine précis (infirmières, travailleuses sociales, policiers ou encore avocats par exemple; voir Tremblay...

Share