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CHAPITRE 2. LE REGARD D’UNE ENSEIGNANTE ALGONQUINE SUR L’ÉDUCATION DANS SA COMMUNAUTÉ RÉFLEXION SUR LE VÉCU DES ENFANTS, CELUI DES ENSEIGNANTES1 ET DE LEUR FORMATION MARGUERITE MOWATT-GAUDREAU L’auteure de ce texte est une enseignante algonquine qui a travaillé pendant plus de trente ans auprès des enfants de la communauté de Pikogan, située à trois kilomètres environ de la ville d’Amos en Abitibi (Conseil de la Première Nation Abitibiwinni, 2013). Ce chapitre émane d’une réflexion personnelle sur l’expérience d’enseignement auprès des élèves amérindiens, qui sont porteurs d’une culture d’une richesse indéniable. Afin de situer le propos, voici un aperçu du contexte de cette pratique en ce qui a trait à la juridiction et à l’administration de ­ l’établis­ sement scolaire ainsi qu’au programme et à la langue d’enseignement. Dans les communautés amérindiennes du Québec, le financement de l’éducation, comme celui des autres services communautaires, est sous la responsabilité du gouvernement du Canada. L’administration des écoles est de la responsabilité du conseil de bande local. La langue de la scolarisation des élèves est l’une des deux langues officielles, l’anglais ou le français. Au Québec, les contenus d’apprentissage sont ceux du Programme de formation de l’école québécoise (MEQ, 2001). Dans les communautés amérindiennes, tout comme dans le reste du Québec, les enfants doivent fréquenter l’école jusqu’à 16 ans en vertu de la Loi sur l’instruction publique. Au début des années 1970, la Fraternité des Indiens du Canada préconise la préservation 1. Afin d’alléger le texte, le féminin est utilisé ici pour parler des enseignantes et des enseignants (des étudiantes et des étudiants en enseignement) puisque celles-ci sont plus nombreuses à exercer ce métier. 32 La formation des enseignants inuit et des Premières Nations des langues autochtones ainsi que la formation d’enseignants. Malgré tous ces efforts, il demeure que le discours dominant de notre société à propos des Autochtones est plutôt négatif et dévalorisant. Un tel discours n’est pas sans avoir un effet démotivant chez la population en général et sur les jeunes en particulier. Il faut donc tenter de changer la situation. Mon­ intention ici est de contribuer à l’introduction de ce changement. L’objectif de ce texte consiste à partager une réflexion inspirée, avec le recul, d’un regard sur la réalité de l’éducation des jeunes dans la communauté d’appartenance de l’auteure et à contribuer à la construction d’un discours social positif et valorisant de l’éducation de la jeunesse autochtone. À titre d’auteure, j’ai partagé mes réflexions avec quelques collègues enseignantes autochtones qui ont suggéré quelques idées pour compléter ce récit. J’ai aussi revu et intégré des éléments d’une recherche exploratoire sur les signes avant-coureurs de l’abandon scolaire réalisée en 2006. De plus, j’ai partagé cette réflexion avec les Anciens, aussi appelés les Sages, de la communauté de Pikogan, dont font partie mes parents. Je débuterai en rappelant brièvement l’historique de l’arrivée de l’école dans la vie des enfants algonquins, héritiers d’une culture de tradition orale. Je traiterai ensuite du programme d’enseignement et des langues ainsi que de l’évolution des pratiques éducatives intervenues auprès des générations récentes d’enfants algonquins. Je m’arrêterai plus particulièrement à la compréhension des consignes et des contenus d’apprentissage par les élèves en situation de classe. Certaines observations relatives à la compréhension des mots par les élèves en cours d’activités de lecture, d’écriture ainsi que pendant le cours de mathématiques seront présentées, parce qu’elles m’apparaissent particulièrement liées aux difficultés scolaires que les élèves rencontrent. Je présenterai quelques signes avant-coureurs de l’abandon scolaire observés chez les élèves à la fin du primaire et au début du secondaire, tout en exprimant ma croyance en la réussite scolaire des élèves algonquins. Pour terminer, j’apporterai quelques éléments de réflexion en relation avec la formation d’enseignantes algonquines ainsi qu’avec la pratique de toute enseignante, et quelques suggestions...

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