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13 CHAPITRE DE GERMINAL ÀMALARTIC Comment l’imaginaire minier arrive-t-il en ville? MICHEL JÉBRAK [3.138.141.202] Project MUSE (2024-04-24 05:13 GMT) De Germinal à Malartic 241 Le Québec connaît une crise de ses relations avec le monde minier. Depuis 2009, les débats publics se sont accumulés: un premier signal est donné par le rapport du vérificateur général du Québec en avril 2009. Il souligne la faible capacité du ministère des Ressources naturelles et de la Faune (MRNF) à considérer adéquatement les principaux enjeux économiques, sociaux et environnementaux. En 2009, les débats se focalisent sur deux points chauds. Le développement de la mine d’or de Malartic, en Abitibi, par la compagnie Osisko, conduit au déménagement d’une centaine de maisons et entraîne un débat public qui se clôt partiellement en juillet 2009 après l’avis favorable pour l’ouverture de la mine émis par le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE), autorité de référence dans le domaine. À la fin de l’année, Sept-Îles fait les manchettes; une partie de la population, animée par un groupe de médecins, s’oppose à l’exploration de l’uranium au lac Kachiwis par Terra Ventures, une compagnie junior de Vancouver. La compagnie arrête ses travaux à la fin de l’année 2009. En 2010, c’est le débat sur les gaz de shale (schiste) qui domine les débats publics. La montée du prix du gaz, parallèlement à celui du pétrole, et la mise au point de techniques de production par fracturation hydraulique des roches mères des hydrocarbures, ont conduit les explorateurs pétroliers à se tourner vers les basses terres du Saint-Laurent, entre Montréal et Québec. Toute la zone est couverte de permis d’exploration en 2008. Mais ce développement soudain surprend les populations. La crise éclate à l’automne 2010 et est notamment marquée par la démission de la ministre chargée du dossier. Un rapport du BAPE en février 2011 recommande une évaluation environnementale stratégique face à la faiblesse des informations. Enfin, en mai 2011, le gouvernement de Jean Charest lance un ambitieux programme sur le nord du Québec, le Plan Nord, fortement axé sur le développement minéral et énergétique d’un immense territoire au nord du 49e parallèle. Le Plan Nord fait l’objet d’un débat vigoureux de nature profondément politique, mais aussi stratégique quant à l’équilibre entre l’exploitation des ressources et la conservation (au sens de protection absolue) du territoire. Ces controverses se développent sur le fond d’un débat en vue de moderniser la loi sur les mines du Québec. En 2010, la consultation publique montre les divergences de visions sur les modes de développement, la distribution des responsabilités publiques et la répartition des richesses. Une première version de la loi est abandonnée en décembre 2010, et la deuxième est toujours en discussion. Communication et grands projets 242 L’accumulation de ces crises fortement médiatisées a relancé le débat sur la pertinence du développement minier au Québec, un pays où le langage politique a longtemps valorisé d’abord les technologies du savoir, des biotechnologies à l’aéronautique. Peut-on concilier les deux modes de développement? La nature fortement capitalistique et mondialisée de l’industrie minière a reposé également la question de la responsabilité nationale . Comment être maître chez nous? Mais on peut également lire cette séquence comme la déclinaison particulière de manifestations publiques contre les grands projets de développement, qu’ils soient dans le domaine des ressources ou non. On peut rappeler à cet égard les crises reliées à la centrale thermique au gaz naturel du Suroît (2001-2004), au projet de déménagement du Casino de Montréal (2005) ou à la construction d’un terminal méthanier à Rabaska, près de Québec (2004-2007). Face à un État diminué menant des politiques libérales, le débat minier illustre fondamentalement la question du partage des responsabilités politiques, avec l’avènement de la démocratie participative, voire de la démocratie directe (Carne, 2011). Sur le long terme, plusieurs éléments économiques internationaux peuvent expliquer pourquoi cette crise s’est...

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