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1 Les trois dernières décennies Le basculement du monde Le monde n’est plus le même. On ne travaille pas à changer le monde aujourd’hui comme on le faisait en 1980. Dans les 30 dernières années, nous avons assisté à un véritable renversement du monde. Et il n’y a aucun signe d’accalmie à l’hori­ zon. Si des changements se produisent en lien avec l’expérience accumulée de la coopération internationale, de l’économie sociale et solidaire et de la capacité des mouvements sociaux à changer ce monde, ce basculement du monde est pour beaucoup lié structu­ rellement à la transformation du paysage économique, politique et écologique mondial. Si on veut donner un peu plus de profondeur à la mobilisation pour une économie plus démocratique, plus écologique et plus solidaire dans l’avenir, que ce soit celle du mouvement coopératif et de l’économie sociale et solidaire 6 La transition écologique de l’économie en général (ESS), celle de mouvements comme le syndicalisme des travailleurs, les organisations paysannes, les groupes écologistes ou celle des organismes de coopération internationale (OCI), il faut prendre acte des différences profondes qui marquent les 30 dernières années par rapport à la période antérieure, celle des 30 glorieuses (1945-1975). Car ces nouvelles tendances induisent en bonne partie les tendances de l’avenir. Quelle analyse pouvons-nous faire des mutations en cours? Nous nous plaçons dans une perspective internationale et de conjoncture longue. Pour les mouvements sociaux qui naissent ou qui cherchent à se renouveler comme pour les organisations de l’ESS ou de la coopération internationale, il s’est passé beaucoup de choses dans les 25-30 dernières années qui ont littéralement bouleversé le monde. Tout a basculé dans les années 1980. On peut citer tour à tour: 1) la montée en puissance de la financiarisation du capitalisme ; 2) la chute du mur de Berlin et l’implosion du communisme; 3) le retour des religions sur l’avant-scène de l’espace public mondial; 4) deux décennies sur trois d’échec du développement dans les pays du Sud simultanément à la montée dans les pays du Nord de la précarité du travail; 5) l’urgence écologique, notamment le réchauffement climatique. Nous allons ici explorer ces cinq grandes tendances, certaines plus politiques, d’autres plus économiques ou culturelles, qui viennent modifier radicalement le monde dans lequel nous vivons maintenant. Explorons aussi ce qui en découle pour l’économie coopérative et solidaire, les mouvements sociaux et les OCI: un changement de paradigme, de politique et de stratégies dans la poursuite d’objectifs pour rendre le monde plus équitable, plus écologique et plus démocratique. [13.58.252.8] Project MUSE (2024-04-23 17:37 GMT) Les trois dernières décennies 7 LA montée en pui ssAnce de LA fi nAnci Ari sAti on du cApi tALi sme Nous avons vécu de 1945 à 1975 ce qu’on a coutume de caractériser comme étant «les trente années glorieuses». Ce qui exprime bien cette réalité est ce New Deal bâti au fil de plusieurs décennies du xxe siècle par Roosevelt aux États-Unis et les régimes de social-démocratie en Europe: un compromis historique entre la bourgeoisie et le mouvement ouvrier dans les pays du Nord, toutes deux soucieuses de mettre un terme aux ravages de la pauvreté et un second compromis amorcé entre les pays du Nord et les pays du Sud pour mettre fin au colonialisme. Ce New Deal dans les pays du Nord, un nouveau contrat social en quelque sorte, introduira trois choses qui transformeront substantiellement le capitalisme d’un certain nombre de pays et réduiront considérablement la précarité de condition des travailleurs: 1) la reconnaissance du rôle de l’État comme moteur des protections sociales auxquelles les entreprises doivent participer (assurance emploi, législation du travail, assurances collectives, fonds de retraite…); 2) la reconnaissance de l’État comme acteur économique (intervention de l’État pour réguler le marché par des politiques publiques fortes telle une planification du développement , des nationalisations, etc., politiques inspirées des théories de Keynes) et 3) la reconnaissance comme interlocuteurs auprès des pouvoirs publics d’organisations de la société civile comme les syndicats, les mutuelles, les coopératives, les associations de consommateurs...

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