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PARtiE 2 – la MtE dans diverses disciplines La MTE en tant qu’apport au développement de la recherche en arts Marie-Josée PLOUFFE Département de philosophie et des arts, université du Québec à Trois-Rivières François GUILLEMETTE Département des sciences de l’éducation, université du Québec à Trois-Rivières Comment le chercheur en arts peut-il rendre compte d’expériences sensibles ou esthétiques? Bien qu’un nombre croissant de thèses et d’articles en arts aient été publiés depuis les quinze dernières années (Knowles et Cole, 2008), la recherche en arts demeure relativement récente et il n’existe pas de méthode déterminée liée à l’étude de la pratique artistique en tant que pratique ou selon le point de vue de l’artiste (Gosselin, 2006, p. 26). Ainsi, nous considérons que la publication de chaque recherche en arts, incluant celle-ci, contribue au développement et à l’ajustement de méthodologies fondées comme « science » de l’art, participant à la construction théorique de savoirs sur la pratique artistique. Les premiers chercheurs scientifiques en arts ont dû emprunter à d’autres disciplines des méthodologies leur permettant d’étudier le phénomène artistique, la plupart se référant aux principes fondateurs de la recherche qualitative (Bruneau et Burns, 2007). Le choix de privilégier une approche qualitative pour une recherche répond probablement à une manière de comprendre le réel, mais ce choix induit aussi les chercheurs vers une posture épistémologique. En effet, la recherche qualitative 88 Méthodologie de la théorisation enracinée s’est développée en opposition à un ensemble figé de pratiques et d’approches face à des phénomènes sociaux. C’est avec l’École de Chicago que des chercheurs, adoptant une posture critique, ont commencé à systématiser une approche générale nommément qualitative en intégrant les héritages de la philosophie de l’action, de l’ethnographie et de la phénoménologie, et en systématisant de nouvelles méthodes de collecte et d’analyse des données (Laperrière, 1982; Poupart et Lalonde, 1997). Pour les praticiens chercheurs du domaine des arts, ces principes fondateurs soutiennent une approche qui permet de rendre compte de la richesse d’un phénom ène humain qui touche différentes dimensions d’expériences sensibles, esthétiques, symboliques, inscrites dans le temps: «les praticiens chercheurs du domaine des arts doivent en quelque sorte se donner une méthode permettant d’articuler un savoir émergeant du terrain d’une pratique où la pensée expérientielle et la pensée conceptuelle collaborent de façon particulière» (Gosselin, 2006, p. 27). Dans cette démarche d’ajustement entre, d’une part, la volonté de construire un savoir émergent de l’expérience et, d’autre part, l’utilisation d’une méthode qui valide «scientifiquement» les résultats de la recherche, le piège d’un certain méthodologisme demeure (Bourdieu, 1992). En effet, il arrive que des recherches ne discutent nullement le bien-fondé de leurs approches en conservant dans l’implicite l’adhésion à des méthodes censées être «scientifiques» en elles-mêmes. Pour contrer une variante de ce méthodologisme, il importe de ne pas «forcer» les données afin qu’elles entrent dans le cadre théorique, mais plutôt de construire un cadre théorique à partir des données (Guillemette et Luckerhoff, 2009). 1. La méthodologie de la théorisation enracinée (MTE): regarder autrement En nous inscrivant dans la perspective de la MTE, au-delà de la présentation d’un ensemble de techniques pour récolter et analyser des données, nous désirons intéresser le lecteur à la manière de penser et d’étudier une réalité. C’est pourquoi nous proposons de présenter l’approche de la Grounded Theory ou méthodologie de théorisation enracinée (MTE)1 dans une perspective d’abord épistémologique, l’utilisation de cette méthodologie nous apparaissant comme un apport potentiel pour la recherche dans le domaine de la pratique artistique, notamment parce que ses fondements épistémologiques considèrent le regard du chercheur comme une «variable» positive. La posture épistémologique, 1. Certains chercheurs francophones (D’Amboise et Nkongolo-Bakenda, 1992; Demazière et Dubar, 1997; Laperrière, 1997) proposent une traduction mais utilisent l’appellation anglaise. Les traductions fran...

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