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C’est avec un esprit critique face à la maternité comme institution sociale patriarcale que nous avons entrepris de réaliser cet ouvrage. En effet, il existe dans notre société un discours dominant et institutionnalisé, qui s’inspire d’une vision idéalisée de l’expérience de femmes américaines ou européennes, blanches, hétérosexuelles, de classe moyenne, et qui présente cette vision comme étant naturelle et universelle. Ce discours contribue à la régulation des femmes et de leur maternité, en les désignant comme ultimement responsables de la sécurité et du bien-être de leurs enfants et en leur imposant un ensemble des règles et de normes auxquelles elles doivent obéir pour être perçues comme de «bonnes» mères. Pourtant, nous convenons que l’expérience de la maternité a de multiples visages, qui correspondent rarement aux représentations idéalis ées de la maternité, puisqu’elle est influencée par de nombreux facteurs individuels, sociaux, économiques et politiques. Toutes les femmes ont le sentiment, à certains moments, de ne pas répondre aux exigences de la «bonne» mère, mais certains groupes sociaux sont particulièrement exposés aux pratiques de surveillance et de régulation de la part des institutions. Cette tendance est mise en évidence dans les institutions désignées pour assurer la protection et le bien-être des enfants, sans qu’elles démontrent nécessairement une volonté de saisir la complexité de l’expérience maternelle et les divers facteurs qui l’influencent. INTRODUCTION simon Lapierre Université d’Ottawa dominique damant Université de Montréal 2 Regards critiques sur la maternité dans divers contextes sociaux La maternité peut donc être perçue comme étant contraignante et opprimante, mais elle peut également être vue comme une source de joie, de fierté et d’accomplissement pour les femmes. De plus, même si les femmes ne peuvent échapper au discours dominant sur la maternité, certaines d’entre elles remettent en question certains éléments de ce discours ou y résistent, par des actions individuelles ou collectives. Dans certaines circonstances, la maternité peut même être perçue comme un lieu de pouvoir pour les femmes. Cet ouvrage, qui réunit douze textes traitant de la maternité dans divers contextes sociaux, vise les objectifs suivants: • rendre visibles la réalité et l’expérience de la maternité dans différents contextes sociaux; • faire le point sur les connaissances théoriques et empiriques dans ce domaine; • cerner les enjeux relatifs au développement des politiques sociales et des pratiques institutionnelles et communautaires; • ouvrir des espaces de questionnement concernant la construction sociale de la maternité dans les sociétés occidentales. Dans le premier chapitre de cet ouvrage, Dominique Damant, Marie-Ève Chartré et Simon Lapierre présentent, dans une perspective critique, un certain nombre d’éléments qui sont au cœur de la construction sociale de la maternité. Ce texte vise à faire le point sur la maternité comme institution sociale. Avant d’aborder les divers contextes sociaux dans lesquels des femmes exercent la maternité, nous avons cru important de souligner le fait que certaines femmes choisissent de ne pas avoir d’enfants. Une courte réflexion de Lucie Joubert, sur le choix que font certaines femmes de ne pas avoir d’enfants, présente ainsi avec humour quelques réflexions sur les pressions sociales qui sont exercées sur ces femmes. Ce texte reflète les contraintes sociales liées à la maternité, qui sont parfois implicites et souvent explicites , et l’absence d’ouverture face à la décision de dire non à celle-ci. L’auteure, en s’appuyant notamment sur son expérience personnelle, explique comment les femmes qui choisissent de dire non à la maternité sont contraintes au silence, puisque ce choix est souvent interprété comme un problème personnel – «elle n’a pas réglé ses problèmes avec sa mère» – ou interpersonnel – «elle n’a pas rencontré la bonne personne». Un ouvrage qui porte un regard critique sur la maternité comme institution sociale doit également donner la parole aux femmes qui décident de ne pas avoir d’enfants. Nous l’avons mentionné plus haut, l’institution de la maternité impose à l’ensemble des femmes un ensemble de règles et de normes auxquelles celles-ci doivent obéir pour être perçues comme de «bonnes» mères. Certaines de ces règles sont visibles dès la grossesse et dans les [3...

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