Stimuler le potentiel d'apprentissage des enfants et adolescents ayant besoin de soutien

Préface

PRÉFACE A l’heure où la pédagogie spécialisée veut contribuer à l’essor d’une école basée sur la reconnaissance du droit à l’éducation pour tous et de l’égalité des chances, l’ouvrage de Denise Normand-Guérette vient apporter la richesse de son expérience d’enseignante spécialisée, de formatrice des futurs enseignants et de chercheure. Il contribue à démontrer à l’évidence que la pédagogie spécialisée «constitue autant une discipline scientifique que l’application pratique de celle-ci […] qui s’efforce de faire en sorte que les personnes de tout âge ayant des besoins éducatifs particuliers, de quelque type et degré que ce soit, bénéficient d’une éducation et d’une formation adaptées aux besoins individuels et centrées sur l’individu, dispensées par du personnel spécialisé disposant d’une formation adéquate » (CDIP, Terminologie uniforme pour le domaine de la pédagogie spécialisée, 2007). Cette vision de la Conférence suisse des directeurs de l’instruction publique, Denise Normand-Guérette en fait une démonstration convaincante. Page après page, elle nous permet de découvrir la possibilité de pratiquer une telle pédagogie si tant est que nous acceptions de modifier nos représentations et osions nous lancer dans des pratiques novatrices: percevoir autrement, agir autrement, tel est le message fort de cet ouvrage. Un message qui touche chacun des acteurs concernés: les enfants et adolescents «ayant besoin de soutien», les enseignants, les formateurs. STIMULER LE POTENTIEL D’APPRENTISSAGE DES ENFANTS ET ADOLESCENTS AYANT BESOIN DE SOUTIEN X En ce qui concerne les enfants et adolescents: «Tout être humain, malgré ses limitations physiques ou intellectuelles, peut apprendre et progresser» affirme l’auteure. Ce postulat, choisi comme fondement de son écrit, convie le lecteur à une reconversion du regard soutenu par de nombreux travaux scientifiques. Le diagnostic de «retard mental» n’est pas une fatalité: il ne doit pas nous faire oublier que ces enfants et ces adolescents se construisent, comme tout enfant, au sein d’un environnement dont le rôle est essentiel dans leur devenir. Les modèles biopsychosocial de l’OMS (2001, 2007) et anthropologique de Fougeyrollas (Fougeyrollas et al.,1998; Fougeyrollas, 2010), par leur vision interactionniste du développement et du handicap, nous propulsent vers des horizons nous invitant à déployer nos efforts pour agir sur les facteurs environnementaux qui faciliteront l’accessibilité au savoir. La démarche pédagogique proposée par Denise Normand-Guérette s’inscrit pleinement dans cette conception. Outre ce changement de regard sur l’enfant handicapé, c’est celui sur l’élève qui subit les effets d’une évolution liée à des courants philosophiques et épistémologiques. Rappelons-nous qu’il n’y a pas si longtemps on le considérait comme un être passif qu’il s’agissait d’instruire. Il a fallu attendre le premier quart du XXe siècle, grâce à l’engagement militant de quelques pédagogues éclairés, pour que cet élève se voie accorder un statut d’acteur de ses connaissances. Cette évolution concerne actuellement le handicap. À l’heure où la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées (ONU, 2006) souligne l’importance de la participation des personnes, la position défendue par Denise Normand-Guérette prend toute sa valeur: l’élève est à considérer comme une personne à part entière, à placer au centre de l’acte d’enseignement; un élève qu’il s’agit de soutenir sur le chemin des apprentissages en l’écoutant et en le comprenant dans ses difficultés, en partant de ce qu’il sait et peut faire, en le mettant en position de participation active et de conquête de son propre pouvoir sur les choses. Un être humain, dont la dimension émotionnelle est également à prendre en considération: comme tout enfant et tout adolescent, celui que l’on considère comme ayant une «déficience intellectuelle» possède un inconscient et des instances de personnalité dans le sens freudien du terme. L’avènement de la psychanalyse nous a fait découvrir qu’il ne peut y avoir apprentissage sans désir de savoir, ni motivation sans prise de plaisir: l’affect est au cœur de tout processus cognitif. Cette donnée, l’ouvrage de Denise Normand-Guérette la souligne avec force, à partir de travaux différents, empruntés à des modèles théoriques différents...