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6. La muséologie et les transformations des musées
- Presses de l'Université du Québec
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Chapitre 6 La MuséoLogIe eT Les TraNsforMaTIoNs des Musées daniel Jacobi Université d’avignon et des pays de Vaucluse En France, la muséologie est une discipline encore jeune. Jusqu’au début des années 1990, ni la recherche ni la formation en muséologie n’avaient droit de cité dans les universités. La recherche ne portait que sur les collections ou elle était dans les mains de rares sociologues de la culture. La formation (des seuls conservateurs) était réservée à une école d’application, élitiste et au caractère strictement professionnel. Cette absence, il faut le souligner, a sans doute contribué à faire de la muséologie française une chose singulière et en tout cas distincte et des museum studies anglo-saxonnes et d’autres traditions internationales . Pour comprendre l’école française de muséologie, dorénavant inscrite dans les sciences de la communication, il est nécessaire de dresser un parallèle entre les transformations des musées dans le dernier quart du XXe siècle et la volonté d’un petit nombre d’acteurs d’introduire la formation et la recherche en muséologie dans l’enseignement supérieur français. Il faut souligner que les premiers efforts de rares universités fran- çaises en matière de recherche en muséologie et de formation aux métiers du patrimoine, des musées et de l’exposition ont été soutenus et par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche et par le ministère de la Culture. De quelle façon la recherche en muséologie et ces formations sont-elles nées? Nous commencerons par évoquer le tournant communicationnel des musées qui, sans aucun doute, a impulsé la naissance de la muséologie française. Puis, nous montrerons comment elles ont été contraintes d’évoluer pour tenir compte de la demande sociale et en particulier des transformations qui ont traversé ce secteur singulier de la culture. Cette partie sera centrée sur la médiation et les médiateurs qui se trouveront très vite au centre du champ muséologique. Enfin, dans la dernière partie, compte tenu des lignes de force qui se dessinent dans le champ contemporain du patrimoine et de la muséologie, nous tenterons d’interroger le devenir des musées et celui de la muséologie, dorénavant insérée dans les universités de demain, autonomes, et sommées de redevenir de gros ensembles. le tournant communicationnel des musées et la naissance de la muséologie universitaire Française Il va de soi qu’il était nécessaire de mettre en œuvre deux principes pour introduire la muséologie à l’université: d’une part, conduire des recherches et produire des connaissances sur le patrimoine, les institutions muséales, l’exposition et leurs publics. Et, d’autre part, instruire une réflexion sur les compétences, les emplois et le niveau de qualification que ce milieu professionnel serait susceptible d’intégrer (Dubar et Tripier, 2005). En réalité, avant la décennie 1980-1990, peu de chercheurs s’intéressaient au patrimoine et aux musées. Et quand ils s’en préoccupaient, c’était avant tout avec un regard disciplinaire. Comme, par exemple, les historiens à propos de l’historiographie des collections ou de celle du patrimoine, ou encore des monuments historiques classés depuis le XIXe siècle (Poulot, 2001, 2005; Choay, 2009). Comme aussi certains sociologues qui s’intéressaient aux inégalités en matière d’accès à l’éducation et à la culture. Ainsi Bourdieu a-t-il dénoncé, dès 1966, à quel point l’offre muséale en France et en Europe, en dépit de la volonté affichée d’une politique proclamée de démocratisation culturelle , était totalement hors de portée des classes populaires (Bourdieu et Darbel, 1966). Avant la fin des années 1980, n’existe qu’une recherche sur les musées, encore sporadique et rare, et quasiment rien en matière d’offre d’enseignement ou de formation1 . Au début des années 1990, est créé 1. avant la fin des années 1980, l’université est quasi absente de la formation aux métiers du patrimoine et des musées. tout au plus, les historiens d’art préparent-ils une partie de leurs étudiants à passer le concours de conservateur des musées de beaux-arts. mais la formation...