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Conclusion Comme on l’a vu, le processus de périphérisation caribéenne obéit à une quadruple logique : géographique, historique, économique et géopolitique. Le positionnement géographique de la région a joué en faveur de cette périphérisation depuis que les progrès du transport maritime en Europe ont fait du bassin caribéen un prolongement de la Méditerranée (Taglioni, 1997). Les Européens façonnèrent alors au moyen du commerce triangulaire et de la théorie impériale des «avantages comparatifs» un espace répondant à leurs demandes en matières premières. La mer des Antilles est par la suite elle-même devenue une véritable méditerranée à part entière à mesure que la polarisation se déplaçait vers le nouveau centre régional des États-Unis. Le caractère périphérique est donc partiellement lié au positionnement géographique – en périphérie proche à la fois de la vieille Europe impériale, des États-Unis, et de plus en plus de la Chine (ainsi que Hong Kong et le Japon qui se positionnent dans la région par une série de zones 136 Géopolitique d’une périphérisation du bassin caribéen franches pour accéder au marché nord-américain) –, mais celui-ci ne constitue en rien un facteur déterminant. Le poids de l’histoire de la région et l’inertie de son héritage (inertie qui se mesure facilement en termes d’inégalit és liées aux ethnotypes, par exemple) sont bien plus importants dans le processus de périphérisation. Surtout, cette inertie aurait pu être menacée et mise en danger sans l’apparition et la domination du nouveau centre nord-américain à partir du XIXe siècle. Comme on l’a vu, les États-Unis commencèrent par recoloniser les Grandes Antilles militairement, parfois après avoir aidé les insurgés locaux à se débarrasser de la tutelle européenne, avant de mettre en place un réseau de domination plus complexe relayé localement par les héritiers de la plantocratie. Ce caractère périphérique se mesure aisément aujourd’hui lorsque l’on observe la concentration des dépendances dérogatoires dans la région: dérogation fiscale aux Caïmans, Turks et Caikos, et à Saint-Vincent, dérogation commerciale dans les îles Vierges, dérogation industrielle en République dominicaine, dérogation à la souveraineté étatique presque partout. Symbole de la souveraineté des États-Unis : la quatrième flotte redéployée et les Marines patrouillant dans les eaux nationales des Antilles depuis les Bahamas jusqu’à Trinidad. La région caraïbe est devenue un centre d’affaires lucratif pour les investisseurs étrangers – masque derrière lequel se cachent le plus souvent les firmes multinationales nord-américaines – qui y implantent leurs usines d’assemblages, leurs complexes hôteliers tout inclus, etc. En corollaire se développent tous les trafics du côté des naufragés de ce mald éveloppement: prostitution des employées de zones franches dominicaines, dans toute la région, migration massive des Haïtiens, commerce de drogues illicites, etc. Ce dernier commerce a en outre lui-même été intégré verticalement par les héritiers de la plantocratie, notamment parmi les communaut és blanches et «syriennes» idéalement implantées dans tous les grands ports de l’arc antillais (Cruse, 2009; 2010). La mise au jour de ce processus de périphérisation s’oppose à la vision socioévolutionniste classique qui place les pays à différents stades de développement. Nous sommes en présence d’une logique parasitaire. Le centre ne fonctionne en rien de manière épiphyte. Le centre ne souhaite aucunement le développement de la périphérie, passé un certain stade. L’exemple haïtien l’illustre au plus haut point. La colonisation par les États-Unis au début du XXe siècle y eut pour effet de réorganiser l’espace au profit des firmes multinationales de ce centre, sur place et dans le territoire voisin de République dominicaine où la main-d’œuvre dans les champs de canne et de café manquait (Farmer, 2006; Cruse, 2008). Comme [18.221.174.248] Project MUSE (2024-04-25 11:43 GMT) Conclusion 137 nous l’avons vu, la rhétorique du développement n’est qu’un prétexte à la violence nécessaire au processus de périphérisation. La...

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