Penser le dialogue en éducation éthique

Dialogue critique et pensée critique dialogique dans le programme Éthique et culture religieuse

dialogue critique et pensée critique dialogique dans le programme éthique et culture religieuse maRie-FRaNce daNiel Professeure titulaire université de montréal 2 – Penser le dialogue en éducation éthique résumé Dans divers programmes d’éducation éthique, on relève la nécessité de stimuler chez les élèves une pensée critique en vue d’une amélioration de l’expérience individuelle et sociale. Le programme d’éthique et culture religieuse (ECR) du Programme de formation de l’école québécoise préconise l’apprentissage du dialogue entre pairs pour favoriser l’émergence de la pensée critique chez les jeunes. Or, il est pertinent de se demander si tout dialogue sous-tend une pensée critique et si toute pensée critique est souhaitable pour l’amélioration du mieux-vivre ensemble. Nous sommes d’avis qu’une éducation éthique doit être arrimée à une pensée critique qui, loin d’être technique ou instrumentale, doit être de nature dialogique. Nous comprenons la pensée critique dialogique comme un processus de recherche en commun qui se manifeste dans des attitudes et des habiletés cognitives complexes, qui sont arrimées à quatre modes de pensée, à savoir logique, créatif, métacognitif et responsable. Une étude menée auprès d’élèves du primaire a fait ressortir que chacun de ces modes de pensée se complexifiait sur le plan épistémologique au fur et à mesure d’une praxis dialogique, jusqu’à l’atteinte d’une intersubjectivité. Dans ce texte, nous explicitons les notions de dialogue critique et de pensée critique dialogique en lien avec le programme d’ECR. Partie 2 w Éduquer au dialogue en éthique et culture religieuse – 2 Dans divers pays, l’éducation éthique des enfants et des jeunes advient par l’intermédiaire des programmes scolaires. Ces derniers possèdent diverses appellations, comme programme de morale (Belgique), Éducation à la citoyenneté (France) ou programme d’éthique et culture religieuse (Québec). Théoriquement, la majorité de ces programmes fait ressortir une relation à la pensée critique, puisqu’il est désormais reconnu qu’une pensée critique participe à la défense de la démocratie et au respect des valeurs et des droits humains. Toutefois, il n’existe pas de consensus sur la définition , les visées et les mises en application d’une telle pensée dans les programmes d’éducation éthique. En Belgique, par exemple, la formation à la pensée critique est centrée essentiellement sur l’individu; elle vise à protéger celui-ci contre le flot d’informations non sélectionnées qui l’assaillent et aussi à stimuler le développement harmonieux de sa personnalit é (Ministère de la Communauté française, 200). Au Québec, la pensée critique passe par le dialogue et elle sous-tend une réflexion sur les actions des individus ainsi que sur les principes, les valeurs et les normes de la société en vue d’améliorer le vivre-ensemble (Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport, 200). Nos travaux des dix dernières années ayant porté sur les processus d’apprentissage du dialogue et de la pensée critiques chez les élèves du préscolaire et du primaire, il apparaît pertinent de présenter ici nos résultats de recherche et d’élaborer des relations avec l’éducation éthique dans son ensemble. Toutefois, nous situerons essentiellement notre propos dans le contexte du programme d’éthique et culture religieuse (ECR) du Programme de formation de l’école québécoise. En effet, ce programme, nouvellement mis en œuvre dans les écoles, est encore en cheminement et en voie d’amélioration. Dans ce chapitre, nous revisitons la définition du dialogue, telle que véhiculée dans le programme ECR, et nous mettons en avant une argumentation concernant la nécessité d’insister sur la nature critique du dialogue entre élèves. Notre argumentation trouve son ancrage dans le concept de pensée critique dialogique, la compétence «Pratiquer le dialogue» renvoyant à la compétence transversale «Exercer son jugement critique» (MELS, 200, p. 28)2. . Des réflexions futures, grâce à l’obtention d’une subvention du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (responsable: N. Bouchard; cochercheurs: C. Gendron, J.-F. Duruisseau, M.-F. Daniel), nous permettront de faire des rapprochements entre les programmes d’éducation éthique belges, français...