In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

PÉRIODE DE QUESTIONS Vos vues sont totalement opposées. Est-il possible de les réconcilier? JOHN R. MACARTHUR : Richard Hétu a cet optimisme et croit toujours aux idéaux de l’Amérique. J’y crois également, mais je suis déçu. La Constitution américaine a été malmenée par Bush. Ce n’est pas seulement la question de l’Irak, c’est aussi la remise en question du quatrième pouvoir, c’est-à-dire les médias. Je ne sais pas s’il sera possible de retrouver l’esprit de combat et de confrontation qui doit être le nôtre. Lorsque le premier ministre britannique se présente à une conférence de presse, les journalistes restent bien assis. Tous les journalistes se croient obligés de poser des questions difficiles. Lorsque vous assistez à une conférence de presse en Amérique, on dirait que c’est Louis XIV qui se présente à Versailles. Tout le monde est poli. On se tient debout jusqu’à ce qu’on ait donné l’ordre de s’asseoir. Un ami britannique a formulé une hypothèse:«Chez nous, c’est une monarchie et les journalistes ne croient pas, n’imaginent jamais qu’ils font partie de la structure du pouvoir. Il s’agit d’un royaume géré par un roi ou une reine. Chez vous, les journalistes et le peuple estiment être souverains et cela est très explicitement écrit dans la Constitution. Donc, quand un journaliste critique le pouvoir, c’est comme faire de l’autocritique. Ce n’est pas exactement le pouvoir qu’on critique. C’est nous. Nous, le peuple souverain.» RICHARD HÉTU : On semble croire que je suis naïf. JOHN R. MACARTHUR : Non. Un optimiste admirable. RICHARD HÉTU : Optimiste naïf. 76 Les médias québécois sous influence? JOHN R. MACARTHUR : Américain, quoi ! RICHARD HÉTU : J’essayais d’expliquer l’état d’esprit dans lequel je me trouvais au moment de quitter le Québec. Cet état d’esprit a évidemment changé depuis. Un événement important est l’attentat à Oklahoma City. La première réaction a été d’accuser la filière musulmane ou islamique. Les terroristes étaient, au contraire, blancs et ultraconservateurs. Ils incarnaient un peu cette montée de la droite. En décembre 1998, la Chambre des représentants met Bill Clinton en accusation pour l’affaire Lewinski. 2001, c’est le 11 septembre. Tout ce qui a suivi m’a fait perdre beaucoup d’illusions sur la qualité du New York Times. Il est toujours sensationnel, mais il est aussi manipulable. Cette espèce de vanité qui veut qu’on soit publié à la une a beaucoup joué, je pense, dans les décisions éditoriales du New York Times. Je me demande si les États-Unis peuvent regagner la stature ou l’image qu’ils avaient. C’est un pays que je continue d’aimer, mais le doute s’est immiscé. La presse peut-elle retrouver le rôle qu’elle a déjà eu? J’en doute aussi. La fameuse objectivité qu’on prêtait aux journalistes américains semble avoir été remplacée par un journalisme de combat, de parti. De plus en plus, on a l’impression que la presse américaine adopte le modèle européen, c’est-à-dire qu’on choisit les journaux ou les chaînes qui vont refléter une certaine ligne de pensée. M. MacArthur, lorsque vous avez un tel discours devant un auditoire américain, quelle est la réaction de celui-ci? JOHN R. MACARTHUR : D’habitude, on m’ignore. C’est l’indifférence. L’indifférence est la meilleure tactique pour éliminer l’opposition. Lorsque je suis invité à participer à une émission de télévision, c’est souvent annulé, car on ne trouve pas d’opposition. Si le New York Times a reconnu son erreur, pourquoi répète-t-il ce genre d’erreur? Et ce genre d’erreur, est-ce que ça relève de quelques journalistes ou du journalisme lui-même? JOHN R. MACARTHUR : Pour faire carrière à Washington, ce que j’appelle Versailles, il faut rester à proximité de la cour. Le journalisme a un problème. On ne peut faire ce qu’on veut. Si l’on commence à faire ce genre de journalisme, on se retrouve vite congédié. [18.191.21.86] Project MUSE (2024-04-19 05:32 GMT) Période...

Share