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Le français au Québec État des lieux Samia I. Spencer1 Auburn University Résumé Cet article examine la situation de la langue française au Québec depuis la Révolution tranquille jusqu’à nos jours. Sont également passés en revue l’effet et les conséquences de la loi 101 sur l’usage du français comme langue officielle, normale et habituelle de tous les Québécois quelle que soit leur origine. Les progrès accomplis en trente ans pour assurer la qualité et la place du français sont notés, ainsi que les défis linguistiques, culturels et démographiques actuels auxquels fait face cette langue au Québec, et dont certains se retrouvent ailleurs aussi en francophonie. 1. Ce travail a pu être réalisé grâce à l’appui et au soutien de madame Nadia Assimopoulos et monsieur Conrad Ouellon, du Conseil supérieur de la langue française, et de la sénatrice canadienne Céline Hervieux-Payette. Les livres et les publications qu’ils m’ont fournis continuent à susciter mon intérêt pour la question linguistique au Québec. Puissent ces quelques mots exprimer la profonde gratitude que je leur dois. Le Québec à l’aube du nouveau millénaire 109 C’est en 1960 que commence la Révolution tranquille au Québec; pourtant, il faudra attendre l’arrivée au pouvoir du Parti québécois, 16 ans plus tard (1976), pour mettre fin aux affrontements, aux crises, et même à la violence qu’avait causés la question linguistique aux gouvernements précédents, et dont l’une des plus longues et des plus médiatisées est sans doute la crise de Saint-Léonard (Robert, 2000). La Charte de la langue française, communément connue comme la loi 101, est promulgée le 16 août 19772 . Elle assure désormais «la paix linguistique», après une série de lois controversées, insatisfaisantes et inefficaces, et entame la transformation du français de «“langue en exil” […] en langue de […] modernité, enrichie d’un foisonnement de néologismes» (Bredimas-Assimopoulos, 2005, p. 10). Adoptée dans le sillage de la Révolution tranquille et considérée comme l’un des événements les plus marquants de l’histoire moderne du Québec, cette loi avait pour objectif de faire du français «la langue officielle, normale et habituelle» de tous les Québécois, quelle que soit leur origine. Elle définissait une politique linguistique précise pour l’utilisation du français dans tous les domaines publics, y compris la santé, les services sociaux3 , les ordres professionnels, les associations de salariés, l’administration publique, les assemblées délibérantes, la consommation, l’enseignement, les affaires, le commerce, la toponymie, la justice, l’étiquetage et l’affichage. L’épineuse question de la scolarité des immigrés sera ainsi définivement réglée: ils seront désormais orientés vers l’école francophone, à moins d’être d’origine anglophone. Quel a été le sort de cette loi en trente ans? Comment a-t-elle été appliquée? Quelles sont les conséquences qui en ont résulté? Quels sont les défis qu’elle affronte de nos jours? Quelles sont, dorénavant, les perspectives dans lesquelles il faudra la considérer? Telles sont les questions que nous proposons d’aborder dans les quelques pages qui suivent. L’adoption de la loi 101 n’a pas été nécessairement bien accueillie par tous. En fait, elle a été perçue par certains comme cherchant à consolider la position des Canadiens français au détriment des minorités culturelles, plus particulièrement par l’élite anglophone de l’époque. Celle-ci prenait rarement la peine d’apprendre le français et s’est trouvée tout à coup face à un questionnement identitaire, obligée de reconsidérer l’idée qu’elle se faisait d’elle-même et de sa position au sein de la province. Cependant, après le choc initial et le départ de quelques grandes sociétés, telles que Fraser Paper et Sun Life Insurance, qui déplacent leur siège de Montréal à Toronto, une majorité d’anglophones s’est éventuellement adaptée aux nouvelles réalités. En quinze ans, entre 1971 et 1986, le pourcentage d’anglophones bilingues dans la région de Montréal passe de 34,9% à 54,2%, c’est-à-dire une...

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