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CHAPITRE 2© 2007 – Presses de l’Université du Québec La trajectoire structurelle du Saguenay–Lac-Saint-Jean Longtemps caractérisée par une simple économie de cueilleurs-chasseurs nomades, le Saguenay historique1 des Amérindiens fut en tout premier lieu traversé par un grand cycle économique concerné par la traite des fourrures (tableau 2.1). Plusieurs rivières servirent à la « descente » de cargaisons de fourrures au printemps vers Sept-Îles, Betsiamites, Tadoussac, Baie Saint-Paul et autres postes de traite de moindre importance . À la suite de l’établissement du poste de traite de Chicoutimi en 1671, cette route des fourrures qui remontait jusqu’à la baie James par la rivière Ashamushan a permis l’extraction et la première transformation de cette ressource très en demande sur le marché européen de l’époque. 1. Voir le texte de Mgr Victor Tremblay (2005), «Le nom de Saguenay dans l’histoire », revue Organisations et territoires, vol. 14, no 2, printemps-été, p. 19-26. Tableau 2.1 Cycles de l’économie du Saguenay–Lac-Saint-Jean 1671 à 1838 Cycle de la traite des fourrures 1838 à 1939 Cycle de la colonisation 1897 à 1920 Cycle de la première impulsion industrielle 1925 à 1929 Cycle de la deuxième impulsion industrielle 1941 à 1948 Cycle de la troisième impulsion industrielle 1942 à 1982 Cycle de très forte croissance : « 40 glorieuses » 1981… Contre-cycle de changements structurels majeurs Cycle « postindustriel » en émergence 26 Le Saguenay–Lac-Saint-Jean face à son avenir© 2007 – Presses de l’Université du Québec Au cours de la première phase de colonisation des terres (classe agricole) et d’écrémage du bois d’œuvre (classe forestière) pour le marché anglais, qui débuta officiellement en 1838 au Saguenay–Lac-Saint-Jean, une classe commerçante se forma à travers de petits noyaux urbains à Bagotville, Jonquière, Roberval, Alma et évidemment Chicoutimi. Ce cycle de forte et de quasi exclusive colonisation dura jusqu’à la fin des années 1930. Si les deux premières classes (agricole et forestière) fournirent à la région des surplus de main-d’œuvre, des entrepreneurs et des capitaux à la classe commerçante, cette dernière s’intéressa au progrès général de la collectivité régionale, d’abord par la construction d’églises, ensuite en organisant des services collectifs en éducation, santé, hygiène publique et voirie. En outre, des demandes furent acheminées vers les gouvernements supérieurs afin d’obtenir des infrastructures et des équipements de transport. À la fin du XIXe siècle, une importante élite d’affaires composée de commerçants, de forestiers, de fabricants, d’industriels, de gens exerçant des professions libérales était bel et bien présente au sein de plusieurs petits noyaux urbains de la région. Avec l’élite religieuse et l’élite politique, elle tentait de s’approprier des leviers locaux et régionaux de développement économique, social et culturel. Au tournant du XXe siècle, un véritable démarrage industriel eut lieu, telle une rupture dans la structure de l’économie régionale. Il fut bien sûr commandé de l’extérieur par la demande américaine de pulpes et ensuite de pâtes et de papier à partir de 1910. Des intérêts extérieurs ont alors consenti des investissements très importants. Mais des intérêts locaux issus de la classe d’affaires émergente ont aussi tenté de se tailler une place parmi ces investisseurs. La saga entre ces deux sources de capitaux en compétition pour s’accaparer les ressources naturelles et les principaux moyens régionaux de production est bien documentée par les historiens. Le capital extérieur en sortit gagnant, ce qui fut ensuite confirmé par les investissements massifs exogènes dans la production hydroélectrique et la production de l’aluminium à la fin des années 1920. Déjà en 1929, il y avait dans la région huit établissements de production de pâtes et papiers ainsi qu’une aluminerie. En réalité, le décollage industriel fut alors double au Saguenay–Lac-Saint-Jean, d’abord dans la production de pulpe (par la suite pâtes et papiers) à partir de 1897, puis dans la production d’aluminium (électrochimie) en 1925-1926. Mais cette industrialisation a considérablement ralenti au cours de la grande crise des années 1930, surtout dans le premier secteur. À travers ce décollage de l’industrie, les...

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