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LE PARTI PRIS DE LA SPECTATURE1 It’s true that I don’t take showers. If there’s no other way to bathe, then I make sure all of the doors and windows in the house are locked, and I leave the bathroom door open and the shower curtain or stall door open so I have a perfect, clear view. I face the door no matter where the showerhead is. [...] Prior to Psycho I was a relatively normal bather, but after it was a different story. It wasn’t the shooting of the scene that caused the damage, it was seeing the film in its entirety later. (Janet Leigh et al., 1995, p. 131) e meurtre sous la douche de Psycho est sans aucun doute le plus célèbre morceau de film tourné par Alfred Hitchcock. C’est également , il me semble, le fragment de cinéma le plus connu de toute l’histoire du septième art. Aussi n’est-il pas rare de rencontrer aujourd ’hui, trente-six ans après la parution du film, des jeunes gens qui, bien qu’ils ne fussent pas nés à l’époque, ont connaissance de cet événement filmique, et ce, même s’ils n’ont jamais vu le film. Les sources de ce savoir sont multiples : ces gens auront peut-être visité le parc 1. Cet article constitue une version abrégée du premier chapitre de Psycho. De la figure au musée imaginaire, Paris, L’Harmattan, coll. «Champs visuels», 1997. Martin LEFEBVRE Université Concordia L 226 | THÉORIES ET PRATIQUES DE LA LECTURE LITTÉRAIRE thématique des Universal Studios en Californie, où le plateau de tournage de la fameuse salle de bains a été reproduit; ils auront peut-être regardé la télévision en 1992 alors qu’on annonçait au bulletin d’information le décès d’Anthony Perkins et qu’on montrait, en hommage, un extrait du meurtre sous la douche (sans se douter bien entendu que Perkins, doublé, n’y apparaît pas!); ou bien ils se seront fait expliquer l’événement par quelqu’un qui en a été impressionné et qui jugeait ce savoir digne d’être transmis, ne serait-ce que pour comprendre certains épisodes de séries télévisuelles comme The Simpsons, Married With Children, ou des films comme The Funhouse, The Prowler, Fade to Black ou Blow Out, pour ne citer que quelques exemples; à moins que ce ne soit pour comprendre la signification d’un nouveau rideau de douche mis en vente récemment à New York, sur lequel on a imprimé un photogramme tiré du meurtre sous la douche ; ou encore pour saisir la signification de certaines publicités d’accessoires de salle de bains qui parodient cet épisode de Psycho. Ce que montrent ces exemples, c’est la prégnance de ce fragment filmique dans l’aire culturelle nordam éricaine. Dit autrement, une fois qu’on a identifié le meurtre sous la douche, on risque de le rencontrer un peu partout dans les productions culturelles, dans les monologues des stand-up comics, à la télévision, au cinéma, sur des cartes de vœux et des cartes postales, sur des jaquettes de livres consacrés au cinéma d’Hitchcock, etc. Cette prégnance culturelle est l’indice d’une profonde impression laissée sur le spectateur de Psycho – comme en témoignent les propos de Janet Leigh cités en exergue. En fait, dès la parution de Psycho au printemps de 1960, le meurtre sous la douche est directement lié à l’important succès financier du film. Comme le rapporte le New York Times de l’époque: «Any number of teenagers have gone to see this movie several times over and the word is apparently out around the suburbs that “the blood in the bathtub scene” is hot stuff2.» Grâce en bonne partie au meurtre sous la douche, le film, on le sait, prendra rapidement l’allure d’un petit phénomène social: on rapporte, par exemple, que certains spectateurs perdent connaissance pendant la projection, d’autres sont révulsés et sortent tout simplement de la salle, tandis que d’autres encore, je l’ai mentionné ci-dessus, reviennent voir le film à plusieurs reprises3. Si 2. Cité dans Robert A. Kapsis (1992, p. 60). 3. Cf. Kapsis (1992) et Stephen Rebello (1991). Rebello raconte une anecdote que lui a relatée Janet Leigh: «A theater manager told...

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