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Attention ! Un biais peut en cacher un autre II fallut longtemps à E. Pidémio pour se remettre de l’indigestion de tests statistiques que lui avait fait subir Anna-Lise. Cela avait failli le dégoûter à tout jamais de l’épidémiologie et de ses charmes. Mais ceux d’Anna-Lise étaient plus forts que tout, et un beau jour E. Pidémio reprit son téléphone... — Salut Anna, j’ai besoin de toi. Je rentre d’une séance d’E.P.U. organisée par les laboratoires Sunshine, avec le professeur J. Necot. Il nous a parlé de l’enquête qu’il a fait faire par un thésard à partir des archives de son service de gynécoobst étrique. D’après lui, il y a une augmentation de l’incidence des grossesses extra-utérines depuis 10 ans, et cela parallèlement à l’augmentation des infections des voies génitales et des avortements. Il en déduit (CQFD !) que c’est la libération des mœurs sexuelles qui en est responsable en tout premier lieu. J’ai très nettement l’impression qu’il mettait la charrue avant les bœufs, mais je n’ai pas su l’argumenter précisément. — Ses conclusions sur la causalité sont en effet farfelues. Ce genre de travail fait sur les dossiers d’un service est certainement intéressant pour connaître l’évolution de la pathologie traitée dans le service. Par contre, pour ce qui est d’étudier les causes de cette évolution, cela ne permet pas d’aller très loin. D’abord, il faudrait vraiment être sûr que l’augmentation des grossesses extraut érines qu’il observe dans son service correspond bien à une augmentation de l’incidence dans la population. — Si je me souviens bien de nos premiers entretiens, pour mesurer un taux d’incidence, il faut connaître non seulement le numérateur (c’est-à-dire le nombre de nouveaux cas), mais aussi le dénominateur (c’est-à-dire l’effectif de la population auquel rapporter ces cas). Or, pendant une période de 10 ans, l’effectif et les caractéristiques de la population peuvent avoir beaucoup changé. Je connais bien l’hôpital où travaille le Professeur J. Necot. Depuis 10 ans, le recrutement de son service s’est beaucoup modifié : l’hôpital est devenu, il y a 5 ans, hôpital de secteur, et la construction de logements sociaux a beaucoup transformé les caractéristiques démographiques de la population. — Et même si on était sûr qu’il y a véritablement augmentation de 76 L’ÉPIDÉMIOLOGIE SANS PEINE [3.141.202.54] Project MUSE (2024-04-25 08:35 GMT) LES AVENTURES DU DR E. PIDÉMIO ET DE SON AMIE ANNA-LISE 77 l’incidence, n’étudier que les dossiers concernant les malades permet, au mieux, d’avoir des idées sur les causes de cette évolution. On ne peut étudier sérieusement ces causes que dans le cadre d’une étude comparative avec un groupe de témoins ad hoc. — Mais enfin, peut-on faire des enquêtes à l’hôpital puisqu’il n’y a que des populations de malades et, de plus, non représentatives de la population générale ? — Le plus souvent, la question se pose différemment. On fait de nombreuses enquêtes cas-témoins à l’hôpital parce que le groupe de malades est facile à constituer, en particulier pour les maladies rares qui se concentrent tout naturellement dans les lieux où on les soigne. Les problèmes se posent surtout pour le recrutement du groupe de témoins. En général, ce groupe de témoins est constitué par des individus atteints d’une autre maladie que la maladie étudiée. On a a priori le droit de le faire puisque, même s’ils sont malades, ils sont indemnes de la maladie étudiée. Dans le cadre d’une enquête ayant pour but d’étudier le rôle d’un facteur de risque, on suppose que la fréquence de ce facteur dans le groupe témoin est une bonne estimation de sa fréquence dans la population générale... Et c’est dans cette supposition que le bât peut blesser. — Par exemple ? — Par exemple, lors d’une enquête cas-témoins, une association entre consommation de café et maladie coronarienne avait été mise en évidence. Or...

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