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Déviations de la conduite érotique par Jean-Pierre TREMPE [18.119.160.154] Project MUSE (2024-04-24 04:38 GMT) Différents termes sont utilisés pour désigner les comportements sexuels qui échappent aux critères de normalité encore admis dans notre société et qui sont ceux de la rencontre costale entre deux personnes adultes, consentantes et de sexe différent. Le choix d'un terme particulier n'est certes pas indifférent. Il permet au contraire de déceler un idéal ou une certaine attitude face à la sexualité. C'est ainsi que les auteurs préfèrent utiliser le mot déviation qui présente une faible coloration morale, tout en indiquant qu'il existe malgré tout une direction normale propre à la sexualité humaine. Ceux qui refusent de se situer dans un contexte normatif vont plutôt parler de variation de la conduite érotique. Le concept de variation est purement descriptif. Il n'est sous-tendu par aucune référence normative, si ce n'est celle du plaisir retiré lors de l'activité sexuelle. Nous ne saurions adopter cette terminologie puisque nous allons nous situer dans une perspective ontogénique. Nous reconnaissons cependant que le terme « variation » a l'avantage de ne contenir aucune connotation péjorative. Mais il accorde arbitrairement à la conduite atypique une auréole de fantaisie qui, en fait, n'a rien de libre et de passager. En sexologie, il est parfois question de « paraphilie », mot qui, à notre avis, n'a rien de rassurant pour l'oreille profane. L'utilisation de ce terme nous paraît justifiée à cause de sa neutralité affective et morale. Cependant, il ne saurait être introduit sans réserve puisqu'il sert encore très peu dans les écrits scientifiques et qu'il risque, de ce fait, de laisser croire au lecteur qu'il désigne autre chose que ce qui est visé par les termes plus courants de déviation ou de perversion. Il y a, enfin, le mot «perversion» qui porte la plus grande charge d'émotivité et d'ostracisme. On y trouve associés la corruption, le goût du mal, la criminalité, etc. C'est pourquoi beaucoup d'auteurs hésitent à utiliser ce terme, certains allant même jusqu'à proposer son bannissement du vocabulaire scientifique. Ce qu'il importe de saisir, au-delà de la terminologie, c'est la nature du critère utilisé pour qualifier d'anormale une conduite sexuelle donnée. Nous croyons cependant que le terme « perversion » a sa place dans le vocabulaire clinique et qu'il serait une erreur, pour la sexologie moderne, de le répudier sans plus de discussion. Mais son champ d'application doit être circonscrit de façon rigoureuse. Nous pensons qu'il correspond à une réalité psychodynamique spécifique qui n'est pas de l'ordre de la psychose, de la névrose, des inhibitions sexuelles et encore moins de 1'organicité. Il faut certes partir d'une constatation phénoménologique de l'expression sexuelle, mais aux fins d'en dégager la signification profonde. En ce sens, il y a des formes d'homosexualité qui relèvent de l'inhibition sexuelle, d'autres qui sont de nature psychotique et certaines enfin qui s'inscrivent dans le registre de la perversion proprement dite. Mais ces distinctions sont rarement considérées puisque seul le comportement manifeste tient lieu de référence. Stoller (1975) a essayé, dans un livre récent, de mieux circonscrire le domaine de la perversion. Celle-ci représente, à ses yeux, la forme érotique de la haine. Ce sont les désirs de dominer, de faire du tort, de triompher de l'autre dans l'agir sexuel qui sont selon lui, des manifestations de la perversité de l'acte. Nous avons là un exemple de dépassement de l'approche descriptive qui redonne au mot «perversion» sa connotation première: changement en mal. Le critère éthique s'appuie sur un idéal personnel, collectif ou religieux. La complémentarité anatomique et fonctionnelle des organes génitaux polarise la référence biologique. La norme statistique cherche sa vertu dans la moyenne, alors que le critère évolutif ou ontogénique privilégie le stade terminal du développement. L'anormal se repère ici dans les points de fixation ou dans la régression à un mode plus primitif de fonctionnement. Nous retiendrons cet axe de référence qui nous paraît être le plus instructif...

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