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C h a p i t r e enfants abusés et placés en institution spécialisée rompre le cercle vicieux des abus Pierre-André Doudin Université de Lausanne et Haute École pédagogique de Lausanne pierre-andre .doudin@unil .ch Miriam erkohen-Marküs Psychologue clinicienne indépendante erkohen@bluewin .ch 9 [18.118.12.101] Project MUSE (2024-04-25 00:39 GMT) Enfants abusés et placés en institution spécialisée 187 Les abus envers les enfants représentent un facteur important de risques pour leur développement social, affectif et cognitif ainsi que pour la qualité de leur insertion scolaire (pour une revue, voir Erkohen-Marküs et Doudin, 2004) . Dans les cas d’enfants abusés par et dans leur milieu familial, les travailleurs sociaux prennent généralement l’option de maintenir les enfants dans leur famille et d’accompagner cette dernière sur un plan social et thérapeutique . Cependant, dans les cas les plus graves, lorsque l’enfant est menacé dans son intégrité physique ou psychique, le placement (notamment sur intervention de la justice) en institution spécialisée de type internat est la seule solution possible afin de garantir sa sécurité et de mettre fin aux mauvais traitements . Idéalement, le placement en institution spécialisée devrait alors constituer un facteur de compensation important pour les enfants, d’abord par l’arrêt des mauvais traitements mais aussi par l’accès à des adultes (enseignants spécialisés, éducateurs, assistants sociaux, etc .) pouvant constituer un modèle d’identification plus positif que celui présenté par les parents . Le placement devrait donc influencer favorablement le développement de l’enfant et réduire les risques de troubles du développement liés aux mauvais traitements . Les recherches qui ont investigué l’efficacité du placement en institution pour des enfants gravement abusés débouchent sur des résultats contrastés . Par exemple, Parkin et Green (1997) nous rendent attentifs au décalage qui peut parfois exister entre le point de vue positif des professionnels de l’institution relativement à la qualité de l’attention et de la protection qu’ils pensent fournir à l’enfant et la perception parfois négative de l’enfant . Comme le relèvent McMahon et Clay-Warner (2002), le placement en institution n’apporte pas toujours les bénéfices escomptés à long terme . Des recherches (p . ex ., Widom, 1989) ont montré que le fait d’avoir été abusé durant l’enfance accroît le risque de délinquance à l’adolescence et à l’âge adulte . Cependant, le placement en institution ne semble pas permettre de réduire sensiblement ces risques par rapport à des enfants maintenus dans leur milieu familial (Widom et Maxfield, 1996) . En nous appuyant sur le point de vue de Cicchetti, Toth et Hennessy (1993) qui considèrent qu’une bonne intégration scolaire représente un facteur organisateur du développement de l’enfant abusé, nous avons entrepris l’évaluation d’une intervention (Doudin, Pons, Pfulg et Martin, 2004) auprès d’enfants sévèrement abusés et placés en institution spécialisée (internat) mais fréquentant un établissement scolaire 188 Intervenir auprès d’élèves ayant des besoins particuliers ordinaire . L’amélioration de l’intégration scolaire de ces enfants à travers notamment un partenariat éducateurs-enseignants, le renforcement de la relation de soutien dont les enfants bénéficient tant dans l’institution qu’à l’école a permis d’améliorer leurs compétences sociales et métacognitives, en plus d’accroître leur sentiment de bien- être . Ces résultats permettent d’être plus optimiste quant à l’avenir de ces enfants . Parmi les divers facteurs pouvant limiter considérablement l’efficacité des institutions spécialisées auprès d’enfants abusés, nous pouvons mentionner les violences institutionnelles . Ces enfants ont subi un ou plusieurs types d’abus dans leur famille ou dans leur entourage immédiat (Doudin, Pfulg, Pons et Martin, 2004) et, une fois placés en institution, ils courent le risque de subir ou d’être les acteurs de violences institutionnelles . Si tel est le cas, l’institution faillit à sa mission éducative en ne constituant pas un facteur de protection ou de compensation pour l’enfant, mais en augmentant plutôt les facteurs de risque liés aux abus: aux abus subis dans la famille viennent s’ajouter les abus subis en institution . Non seulement le placement de...

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