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© 2005 – Presses de l’Université du Québec Édifice Le Delta I, 2875, boul. Laurier, bureau 450, Sainte-Foy, Québec G1V 2M2 • Tél.: (418) 657-4399 – www.puq.ca Tiré de: La ville autrement, Sous la direction de Pierre Delorme, ISBN 2-7605-1342-4 • D1342N Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés CHAPITRE LES NOUVELLES URBANITÉS 12 Carolle Simard Département de science politique Université du Québec à Montréal Dans La civilisation des mœurs, Norbert Elias admet son incapacité à situer avec précision les origines de la civilité, du savoir-vivre et de la politesse. Leur source, dit-il, prendrait racine dans l’origine de l’homme lui-même, tenu d’avoir des rapports avec ses semblables. Dans Politesse, savoir-vivre et relations sociales1, Dominique Picard trace un aperçu historique du savoir-vivre et de la politesse, à partir de leurs « traces » et de leurs « empreintes ». Notant l’évolution des modes de vie et des valeurs à travers les âges, elle constate néanmoins que : Le besoin de règles, la force de la tradition et la persistance d’un certain formalisme font que souvent les changements ne sont qu’adaptation de surface et ne remettent pas en cause les principes fondamentaux du savoir-vivre (p. 27). 1. Paris, Presses universitaires de France, 1998. © 2005 – Presses de l’Université du Québec Édifice Le Delta I, 2875, boul. Laurier, bureau 450, Sainte-Foy, Québec G1V 2M2 • Tél.: (418) 657-4399 – www.puq.ca Tiré de: La ville autrement, Sous la direction de Pierre Delorme, ISBN 2-7605-1342-4 • D1342N Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés 246 La ville autrement Le savoir-vivre serait donc un code pérenne, l’un des marqueurs de la condition humaine. Sans un tel code, les espaces de communication se transforment rapidement en véritables champs de bataille, ramenant le commerce avec autrui au corps à corps. Des traces ainsi laissées par les sans-gêne du chacun pour soi, la ville en regorge : déchets, crachats, engueulades, violences, coups de klaxon, saletés, crottes de chien, bousculades , corps de plus en plus dévêtus, bourrelets adipeux, grossièretés, pléthore de détails intimes, cellularisés… La concentration croissante de la population dans les agglomérations urbaines, la vie trépidante des mégapoles nous amènent à concevoir les bonnes manières en milieu urbain comme une affaire universelle. Pour désigner une même réalité, soit « un ensemble de règles proposant des modèles de conduite adaptés aux différentes situations sociales2 », les termes employés, souvent interchangeables, reflètent les contextes et les valeurs culturelles d’une époque particulière. Tandis qu’au XVIe siècle, avec Érasme notamment3, on s’intéresse davantage à la civilité, nombre d’ouvrages et de traités plus récents reprennent plutôt les termes de politesse et de bonnes manières. En somme, parler de politesse, de savoir-vivre, d’urbanité ou encore de civilité renvoie toujours à un ensemble de préceptes à la base de la vie sociale. Hier comme aujourd’hui, les principes fondamentaux du vivre ensemble permettent de circonscrire une réalité sociale donnée. Mais peut-on continuer d’aborder la civilité et le savoir-vivre comme des vertus sociales absolument indispensables aux rapports interpersonnels? La question mérite d’être débattue au moment même où le plus aguerri des urbains semble en passe de jeter l’éponge, épuisé par l’accumulation des incivilités quotidiennes, ces petites violences largement pratiquées, mais dont tout le monde se plaint. Chacun sait que le vivre-ensemble exige l’actualisation d’un certain nombre de règles fondatrices, à la base des relations sociales. Parce qu’elles sont au cœur du lien social, la civilité et la politesse demeurent des modèles de conduite ; à ce titre, elles ne peuvent être remises en cause sans graves conséquences pour le contrat d’humanité auquel est appelé à participer tout citoyen responsable. La vie urbaine a ceci de particulier qu’elle permet une mobilité sans précédent de l’individu qu’accompagnent une multitude de schémas de la vie personnelle. Paradoxalement, un sentiment largement partagé anime la vie publique : la montée de l’incivilité renvoie à la nature même 2. Politesse, savoir-vivre et relations sociales, p. 3. 3. Humaniste hollandais d’expression latine. Il a entre...

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