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Hybrides culturels Biofictions, biocyborgs et agents artificiels CANADA Ernestine DAUBNER Les interventions ou les stratégies représentationnelles des artistes qui travaillent aujourd’hui dans le domaine de la (micro)biologie, du génie génétique et tissulaire et de la vie artificielle nous incitent à réfléchir aux événements étonnants qui se déroulent actuellement dans notre «siècle biotech1». Jeremy Rifkin, qui a inventé ce terme, dit que nous sommes à l’heure actuelle au seuil d’un changement paradigmatique majeur qui est la transition historique de l’ère industrielle à l’âge de la biotechnologie. Si cette nouvelle ère biotechnologique promet des percées biomédicales extraordinaires à peine imaginables, elle soulève en même temps, dit Rifkin, des questions fondamentales et inquiétantes, surtout en ce qui concerne la manipulation et l’exploitation du vivant dans des buts spécifiquement économiques. Dans son roman Oryx and Crake, Margaret Atwood dévoile avec perspicacité des répercussions apocalyptiques potentielles découlant du mariage pervers entre la recherche biotechnologique et les impératifs 1. Titre du livre de Jeremy Rifkin, activiste politique et président de Foundation on Economic Trends. Voir The Biotech Century, New York, Penguin Putnam, 1999. Ernestine Daubner, théoricienne et historienne d’art, est spécialiste de l’art moderne et contemporain à la jonction de la science, de la technologie et de la culture. Elle enseigne au département d’histoire de l’art de l’université Concordia et poursuit des recherches sur diverses formes d’art médiatiques. En collaboration avec le GRAM et le CIAM, elle travaille actuellement dans le domaine de l’art contemporain et des biotechnologies. Elle est auteure de nombreux articles et a participé à des colloques et des congrès internationaux. 18 Art et biotechnologies commerciaux des corporations. Remplie de biomonstres jamais vus auparavant dans la nature, cette histoire imagée et hallucinante est racontée avec une lucidité perçante, permettant de saisir la complexité des enjeux de cet âge de la biotechnologie. Dans cet ouvrage, des artistes, des commissaires, des chercheurs et des théoriciens offrent divers aperçus importants sur les pratiques scientifiques et artistiques dans ce domaine émergeant et démontrent qu’il y a parfois une étroite collaboration entre l’art et la science. Que ce soit par leurs réflexions critiques, par leurs aperçus de la biopolitique et du posthumanisme, par leurs précisions sur le rôle de l’art et de l’artiste, ou encore par leurs formulations d’épistémologies nouvelles sur des entités vivantes et non vivantes, naturelles et artificielles, les auteurs démontrent qu’effectivement, nous faisons face à une nouvelle ère. Toutefois, même si une nouvelle époque s’annonce, elle porte aussi des échos du passé, révélant ainsi son statut d’hybride culturel. Le bioart(iste), les biofictions et les biomonstres Les artistes qui travaillent le plus, ces dernières années, à dévoiler les enjeux graves découlant de la manipulation, de l’exploitation et de la marchandisation de la vie par les intérêts corporatifs biotechnologiques sont les membres du groupe, le Critical Art Ensemble. Par leurs performances ironiques, impliquant la participation des visiteurs, le CAE tente non seulement de faire une critique objective des représentations, des produits et de la politique liés aux diverses biotechnologies émergeantes, mais il essaie également de démysti- fier les fausses idées toutes faites sur les différentes pratiques scientifiques. Parfois le CAE parodie les corporations biotechnologiques, exposant les liens étroits entre la technologie de la reproduction de pointe et l’eugénisme (Flesh Machine, Society for Reproductive Anachronisms). Ou par un procédé biologique qui inverse les effets des organismes génétiquement modifiés, CAE fait une«contre» culture de graines RoundUp Ready colza, maïs et soja. Ce faisant, il démontre également comment la création de produits OGM profite surtout au capital (Contestational Biology, Free Range Grain). Dans d’autres interventions, le CAE dévoile les mythes implicites dans le projet génome humain (Cult of the New Eve) et dans les biosciences transgéniques qui, au moyen de l’ADN recombinée, donnent vie à des chimères, voir des biomonstres, jamais vus auparavant dans la nature (GenTerra)2. Une phrase citée par le Critical Art Ensemble résume bien leur propos: «Une fois de plus, ce qui nous paraît sous 2. Pour des d...

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