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Domination de la sphère financière Bernard Éliel Les secousses sur les marchés financiers sont devenues si fréquentes, qu’il semble que la politique monétaire leur soit subordonnée, alors que ce devrait être l’inverse. Dans l’économie, la sphère de production crée la richesse, la sphère monétaire doit assurer les meilleures conditions à la réalisation de la croissance et elle doit orienter la sphère financière pour qu’elle assume le financement de la production. L’encadré suivant résume cet enchaînement. Aujourd’hui, la sphère financière guide la sphère monétaire et provoque d’importantes distorsions au niveau de la production. L’indicateur le plus spectaculaire de cette situation est l’augmentation exponentielle du prix des actifs financiers. Historiquement, aucune situation semblable n’a existé ; les autorités monétaires sont-elles en déroute ? Comment en sommes-nous arrivés là ? 1. Professeur au Département d’économie à l’Université du Québec à Montréal. 170 Objectif plein emploi LA MONDIALISATION FINANCIÈRE Les transformations débutent toujours par le secteur financier : les instruments monétaires et les titres sont beaucoup plus faciles à déplacer et à réinventer que le sont les humains peu maniables et souvent récalcitrants. De plus, ces transformations se déroulent aujourd’hui mondialement et globalement. La croissance des risques Depuis le début des années 1980, des changements importants ont transformé les marchés financiers. Ces transformations débutèrent sur les marchés internationaux des capitaux et peu à peu elles gagnèrent les marchés nationaux provoquant de vastes restructurations dans l’organisation et dans les pratiques du secteur financier et aussi dans les réglementations qui les encadrent. La cause première de ces changements fut la croissance des risques. L’intermédiation financière traditionnelle, le rôle des établissements comme intermédiaires entre prêteur et emprunteur, fit place à des modes de financement sur la base de titres, c’est ce que l’on appela la « sécuritisation » de l’anglais « securities » ou encore la « titrisation », de titre. Les établissements de dépôts se mutèrent en opérateurs sur les marchés internationaux de capitaux pour le compte d’entreprises ou de pays émetteurs de titres. Un prêt lie, dans une relation fixe, le débiteur et le créancier, il n’y a pas vraiment de marché secondaire organisé où le créancier peut se départir de sa créance. Alors qu’une obligation, par exemple, peut être vendue sur des marchés très bien organisés. Cette transformation qualitative procédait de la volonté des établissements prêteurs d’avoirs des actifs plus souples pour minimiser le risque de défaillance de leurs débiteurs. Rappelons-nous la débâcle du début de la dernière décennie. En cinq ans (de 1985 à 1991), par exemple, les banques canadiennes ont liquidé à perte la moitié de leurs créances les plus exposées sur le tiers monde, soit plus de 12 milliards. Les banques ont alors augmenté leurs provisions pour créances douteuses de 624 millions en 1980, à la veille de la crise de la dette du tiers monde à 10,2 milliards (1989). Ces provisions sont autant de bénéfices libérés d’impôts ! Cette stratégie fut générale. Mais d’autres risques s’amplifiant, les établissements financiers firent preuve, là aussi, d’une grande imagination en multipliant les innovations financières. L’instabilité des taux d’intérêt et des taux de change provoquèrent sur les marchés des réflexes de prudence chez des établissements peu enclins à prendre des risques. Les banques sont des non-preneurs de risque. Une volatilité d’ailleurs grandement provoquée par la titrisation. Ce fut l’essor des nouveaux instruments financiers (les hors-bilans), dont certains, les opérations dérivées, visaient à se prémunir contre les aléas des marchés (options, swaps, colars...) [Élie, 1995]. Ces risques de marché se divisent en trois sous-catégories : le risque de change, c’est-à-dire la possibilité que la valeur d’un avoir ou d’un engagement fluctue par [18.219.63.90] Project MUSE (2024-04-18 01:13 GMT) Encours des prêts, provisions et pertes implicites Source : Revue de la Banque du Canada, novembre 1991, p. 17. Créances sur les pays désignés (M...

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