-
Chapitre 4. La consolidation financière et nationale de l’Union Saint-Joseph du Canada 1906-1920
- University of Ottawa Press
- Chapter
- Additional Information
E ntre 1896 et 1906, l’Union Saint-Joseph avait profité d’une conjoncture économique favorable pour développer son réseau de succursales et accroître le nombre de ses sociétaires à près de 18 000. Cependant, à partir des années 1907, une nouvelle crise de la mutualité commença à se manifester. Le modèle actuariel de plusieurs sociétés fraternelles, y compris celui de l’Union Saint-Joseph, se révélait inefficace sans un recrutement adéquat, principalement à cause de l’insolvabilité des caisses. Après plus d’une décennie de croissance importante, ces associations dominaient le marché de l’assurance-vie au Canada français. Ce développement ne pouvait toutefois se prolonger indéfiniment. Les mutualistes crurent d’abord que le ralentissement découlait de la récession de 1907 et que le recrutement reprendrait par la suite. Malgré la reprise économique en 1908, la croissance de la mutualité ne put retrouver le rythme du début de la décennie, stagnant même par moments. En réalité, il restait peu de nouveaux bassins de recrutement prometteurs. Pour l’Union Saint-Joseph, dont les administrateurs croyaient pouvoir atteindre le nombre de 50 000 sociétaires avant 1920, l’illusion fut de courte durée. Après une période faste où son essor semblait sans fin, l’association dut affronter une deuxième crise, qui remit à nouveau en question ses méthodes de gestion financière et actuarielle. Ainsi, la décennie 1910 fut une période de transition pour la mutualité, car les sociétés fraternelles durent s’ajuster à la croissance des années précédentes et au ralentissement du recrutement. Dans son rapport annuel de 1920, le surintendant des assurances de la province de l’Ontario, Evan Gray, traita de la situation qui avait cours dans les sociétés de secours mutuels durant les années 1910, en mentionnant : Chapitre 4 La consolidation financière et nationale de l’Union Saint-Joseph du Canada 1906-1920 130 « L’UNION FAIT LA FORCE ! » : L’UNION SAINT-JOSEPH D’OTTAWA / DU CANADA Before the war Friendly Societies were in a transition stage, both in regard to membership and financial status. An uncertainty in the public mind as to the permanency of the basis on which the insurance structure of the societies rested resulted in an annual decrease in the number of new members secured. Then the war and the influenza epidemic added disturbing influences. Some of the societies have met the situation by a readjustment of their rates, which placed the insurance fund on a basis actuarially sound, and these are now on the clear road to a development which will render a larger and better service than even before1 . Dans le cas de l’Union Saint-Joseph, la crise commença avant la guerre, plus précisément lorsque le recrutement ralentit à la fin de la décennie 1900. Cependant, ce n’est qu’en 1918, par l’atteinte de la solvabilité actuarielle, que ses administrateurs résolurent définitivement le problème, en mettant un terme à la dépendance envers le recrutement continuel de nouveaux membres. Le ralentissement du recrutement et la crise administrative des années 1910 Le développement de la mutualité du début du xxe siècle fut caractérisé par deux phases distinctes. Les sociétés fraternelles connurent d’abord une période de croissance, qui s’étendit jusqu’à la fin de la décennie 1900, suivie d’une période de stagnation durant les années 1910 à 1920. Les grandes sociétés fraternelles connurent un ralentissement de leur croissance à partir de l’année 1907 (tableau 4.1)2 . La plupart d’entre elles souffrirent de l’absence de nouveaux marchés pour développer des 1 Ontario, Office of the Superintendent of Insurance, Detailed Report of the Superintendent of Insurance and Registrar of Friendly Societies (1920), p. 2. 2 Ces associations ont été choisies parce qu’elles étaient les plus importantes de l’Ontario et que la mutualité était leur principale raison d’être. Ainsi, l’analyse exclut, par exemple, les ordres orangistes qui, pour 60 000 membres, ne comptaient qu’environ 5 000 certificats d’assurance. Même si des associations comme l’Independent Order of Oddfellows comptaient beaucoup de membres, les données sont soit fragmentaires, c’est-à-dire disponibles seulement pour une province, ou ne permettent pas d’analyser l’ensemble de la p...