La Dynamique multiculturelle et les fins de l'histoire

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188 La dynamique multiculturelle et les fins de l'histoire la raison dans le monde, effectuée à partir des conflits particuliers issus de la vie sociale qui est animée par nos engagements passionnés. Si nous comparons Hegel à Kant, nous voyons que la dynamique de la vie sociale est animée non pas par une «asociale sociabilité », mais par les diverses luttes pour une reconnaissance mutuelle qui sous-tendent nos engagements passionnés. C'est à travers cette reconnaissance mutuelle au cœur de la vie sociale, y compris ses formes dysfonctionnelles de ^connaissance et de nonreconnaissance , que cesengagementspassionnéssont transformés en espaces «raisonnables »régissant de plus en plus nos interactions. Si nous continuons la comparaison avec Kant, Hegel nous permet de mieux comprendre la dynamique de la vie sociale, qui n'est pas simplement nourrie des conflits entre intérêts personnels. Cette dynamiqueproduit desconflits particuliers qui possèdent leurs propres façons de structurer les relations que nous établissons entre nous àtraversnos engagementspassionnés. En mêmetemps, on peut voir comment cette dynamique produit ces espaces «raisonnables» qui nous permettent de développer nos capacités. Je pense que les considérations spéculatives de Hegel éclairent de façon toute particulière notre monde de plus en plus multiculturel. Notre monde est de plus en plus «multiculturel » dans le sens que diverses personnes de provenances culturelles différentes vivent de plus en plus en contact, ce qui créé un espace social distinct. J'ai voulu montrer qu'une dimension importante d'un tel espace social se retrouve dans la reconnaissance, de la part de ceux qui l'habitent, qu'il est structuré non pas seulement en termes familiers et non familiers —le familier se développant dans le cadre de vie familiale; le non-familier étant le résultat d'un contact avec le monde extra-familial —mais aussi selon des familiarités non familières, la reconnaissance d'autres façons de donner un sens au monde. La reconnaissance de ces familiarités non familières comme faisant partie d'un espace social partagé influe sur nos engagements passionnés les uns avec les autres. En effet, cette modulation à partir de la dynamique de la.reconnaissance mutuelle exprime le fait, ou plutôt le mouvement exprimé par le fait, que notre monde devient effectivement de plus en plus multiculturel. Nos engagements passionnés exigent de plus en plus que nous nous reconnaissions par CONCLUSION 189 Le télos dynamique de l'histoire : un monde démocratique partagé et à travers nos engagements, c'est-à-dire à l'intérieur de ces espaces« raisonnables » créés par notre effort en vue d'établir des relations mutuelles. Au sein des espaces multiculturels de la plupart des démocraties occidentales, cette exigence de reconnaissance mutuelle s'exprime souvent en termes de reconnaissance de droits, parfois dans le cadre constitutionnel des structures d'un État, parfois d'un point de vue moral. Ainsi, avec Hegel, nous voyons émerger de la dynamique de l'histoire, soit la lutte pour la reconnaissance mutuelle créant un espace social partagé «raisonnable », un télos $universalité. L'universel émerge de cette lutte pour la reconnaissance mutuelle parce que cette dernière exige de nous, comme dirait John Russon, une critique auto-transcendante de notre intérêt personnel. Cela se reflète dans le sentiment que, en dépit de nos différences, et même à cause d'elles, notre monde devient de plus en plus un monde à partager. Cependant, c'est Marx qui nous a amenés à remarquer que cette universalité de la reconnaissance mutuelle et les espaces« raisonnables » qu'elle crée et qu'elle nourrit ne sont pas du tout distribués équitablement entre tous les êtres humains. En fait, trop souvent, ils ne semblent être que le privilège des bien nantis. Trop de personnes habitent, non pas des espaces « raisonnables », mais des espaces d'exploitation physique qui laissent bien peu de place à la réciprocité. Il semblerait que, du point de vue hégélien de l'histoire, en fin de compte, du moment qu'il existe des espaces« raisonnables », nous pouvons dire que le télos se réalise, même si bon nombre de personnes, sinon la majorité, ne vivent pas leur vie à l'intérieur de cesespaces;leur vie se résume à la dépense des passions et non à l'exercice de la raison. Selon Marx, ce n'est pas l'« idée de liberté »qui...