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8 PENSÉE, IDÉOLOGIE ET POLITIQUE Ce n'est pas un hasard sij'évoque icil'œil. André, qui est un esthète, lui a toujours accordéun rôle centraltant à la maison qu'à l'Université. Il m'a souvent fait penser aux vers de Keats :«Beauty istruth,truth is beauty. That isail ye know on earth and ail ye need to know ». La quête de la vérité et celle de labeautéont toujours constitué deuxélémentsindissociables chez lui. Tout ce qui se rattacheà lui comporteune dimension esthétique, qu'il s'agisse des meubles qu'il a patiemment collectionnés, ou encore de sa prestance, de sonstylepédagogique, de sesimages verbalespour lemoins colorées, de son amour pour les beaux livres ou de son désir d'assurer la vitalité des Presses de l'Université d'Ottawa. Pourlui, lavéritéet labeauté ont toujours été l'objet d'une seule quête. Comment cet architecte et bâtisseur, qui a occupé le poste de directeur du Département de science politique pendant trois ans seulement, s'y est-il pris pour y laisser à jamais samarque? Les traces de son influence sont visibles surtout dans le type de formation offert par le Département. Une place de choix est accordée à l'étude de la pensée politique. En outre, André a insisté pour que le Département poursuive sa mission de familiariser les étudiants avec les différents aspects de lasciencepolitique. Àl'époque,André s'était opposé à cequ'il appelait la formationde «cafétéria »,où chacunse sert à son gré, prenant à gauche et à droite ce qui lui plaît. Comparé à d'autres programmes de science politique offerts ailleurs au Canada, celui de l'Université d'Ottawa est l'un de ceux qui a conservé le plus d'éléments d'une formation obligatoire et diversifiée. L'importance accordée à l'étude de la pensée politique dans ce département continuede semanifester de plusieurs façons :par lenombre de cours obligatoires d'abord, mais aussi par le nombre de cours facultatifs, par le nombre de professeurs et par l'importance que lui accordent les autres professeurs qui n'en font pourtant pas leur principal objet de recherche. Faisant partie de ce dernier groupe de professeurs, je constateàquelpoint lesquestions quejepose dans mesrecherches et dans mon enseignement comportent une dimension nettement théorique, qui dépend, dans une large mesure, du milieu particulierque constitue notre Département. Quand j'essaie de comprendre les raisons de l'influence exercée par André à l'université, trois éléments principauxme viennent à l'esprit :la vocation, la volonté et la vision. À l'université, l'intellectuel qu'est André TÉMOIGNAGES 9 a moins occupé un emploi que réalisé une vocation. La manière dont André aconstammenttraquélavérité (etlabeauté,j'y reviendrai) dansses travaux et son enseignement a suscité le respect de ses collègues. Son autorité morale lui vient indéniablement de son statut de véritable intellectuel. La vocationest indissociable de la volonté. André est un passionné. La vigueur de son engagement s'est fait sentir dans tous les groupements et organismes desquels il a fait partie, et dans les différentes réunions auxquelles il a participé. Ilne s'est pas contenté d'exprimer ses idées, il a tout fait pour qu'on les mette en pratique. Bref, il s'est toujours comporté comme un intellectuel déterminé, espèce redoutable s'il en est une. En fait, cequ'il voulait étaitsimple et se traduisaitpar un objectif que tous pouvaient partager :un excellentdépartement de science politique. Il a toujours voulu quelapensée politiqueaitlaprééminence sur tout dans ce département et, conséquemment, ils'est employé àceque les étudiants reçoivent une formation diversifiée. Par sa vision, André a été une grande source d'influence à l'Université. Des études publiées récemment insistent sur l'importance pour les leaders de présenter une vision cohérente des choses. Nul doute qu'André a compris cela. Iln'a jamaisdouté que le Département pouvait viser à l'excellence et aussi l'atteindre. Pour lui, nous formions un véritable groupe, doté de qualités distinctes. Nous étions pourtantjeunes et peu sûrs denous ;l'idée quenous formionsun toutaétéune révélation et une inspiration. Dans les années 1970, il n'y avait aucune tradition départementale ensciencepolitiqueetmêmeensciences sociales ; celles-ci étaient alors un produit récent et relativement fragile...

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