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Préface Encore la photographie? On a écrit tant de choses sur elle... On a multipli é les études savantes, les biographies de photographes célèbres et les livres de collection, cela à un tel point de surcharge que l'on pourrait croire à un épuisement du sujet. Et puis, au cours des dernières années, d'autres modes d'expression ont envahi tous les médias par la voie des technologies nouvelles. Dans ces conditions, est-il trop tard pour s'en préoccuper ou trop tôt pour y jeter un regard rétrospectif? Certes, la photographie n'est plus nouvelle en tant que technique, mais elle est toujours particulière, non plus seulement en regard de la peinture, comme ce fut le cas pendant plus d'un siècle, mais par voisinage avec des techniques autres éveillant la pensée à leur manière propre . Elle a également ceci de particulier que, même ayant acquis un statut privilégié au sein des arts dits officiels depuis plusieurs décennies , elle demeure aussi une pratique populaire et commerciale, on pense à la publicité ou à la presse, et ce parallélisme donne lieu à des classifications de genres qui perdurent, voire se renforcent. Au moment où les modes d'expression ont tendance à se confondre et que l'histoire de l'art questionne sévèrement le partage traditionnel des arts mineurs et des arts majeurs, la photographie dans son ensemble échapperait à la dé-hiérarchisation. Nous pourrions évidemment conclure rapidement que l'opposition art/document repose sur la forme et la fonction de l'image photographique, mais ce raccourci utile n'est qu'un détour dont les fondements s'avèrent des plus complexes et touchent, bien entendu, bien d'autres formes d'expression visuelle. Il faut noter que les études spécialisées les plus rigoureuses ont concourut à perpétuer la polarisation et font maintenant figure d'autorité que l'auteur du présent ouvrage a l'audace de questionner, tant d'un point xiv PREFACE de vue sémiotique, philosophique, qu'historique, en délaissant l'ontologie au profit d'une théorie de la réception axée sur les modes de perception , incluant la croyance visuelle qui joue un rôle primordial dans la reconnaissance du médium et de ce qu'il représente. Après les Benjamin, Barthes, Dubois, Krauss, Durand et tous les chercheurs sérieux qui, dans leur foulée, ont établi les bases d'une sémiotique de la photographie, il fallait à Jean Lauzon un certain courage pour reprendre la question pas à pas, signe par signe, et construire un modèle d'analyse critique qui chamboule les a priori en s'écartant des catégorisations en cours où l'on persiste à opposer la photographie artistique et la photographie documentaire, la première devant faire état d'une certaine opacité de représentation au profit du médium expressif, la seconde ayant, au contraire, à montrer le monde en transparence , comme si les choses avaient été là, commecela. C'est en réaction à cette typologie binaire, il faut le dire autoritaire et dont la portée excède la nature du signe photographique pour en quelque sorte imposer une mission aux photographes, que l'auteur fuit le confort des pré-classifications et entreprend d'examiner en profondeur ce qu'il qualifie de contexture photographique, s'inspirant en partie de la philosophie du langage de François Récanati qu'il a cependant l'heureuse initiative de ne pas forcer sur un corpus qui commande ses propres avenues méthodologiques. Il est ici postulé que selon des degrés divers, chaque image photographique , quelle que soit sa fonction assignée, jouerait sur les deux versants de la transparence et de l'opacité, laissant le récepteur établir un état d'équilibre entre ce qu'il perçoit et ce qu'il conçoit de la présentation et de la représentation, selon ses propres assises sensorielles, son expérience du médium, ses attentes, ses croyances, ses connaissances empiriques et culturelles. En insistant sur les mécanismes de la perception visuelle et en introduisant des facteurs socioculturels complémentaires , l'auteur se distancie des théories du langage verbal et même d'une sémiotique strictement visuelle et opte pour une pragmatique spécifique des images photographiques dans un esprit qui prend le risque de contredire les acquis théoriques que l'on croyait indiscutables et de dire cequ'il était de mise...

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