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INTRODUCTION L'émergence des centres culturels en Ontario français est un phénom ène récent. Les premiers centres voient le jour au courant des années 1950 et 1960 à Sudbury, North Bay et Ottawa. Le mouvement connaît toutefois son apogée durant les années 1970, alors qu'une douzaine d'associations sont mises sur pied dans de nombreuses collectivités incluant Timmins, Kapuskasing, Rockland, Penetanguishene, Hawkesbury, Chapleau, St-Catharines, New Liskeard, Hearst, Toronto et Alexandria. Oshawa ouvre ensuite un centre à la fin des années 1980. Cette initiative, mise tout d'abord de l'avant dans le nord de la province, est ainsi reprise à un rythme soutenu dans toutes les régions de l'Ontario. Comment expliquer l'apparition d'un tel mouvement? Comment a-til influencé la collectivité francophone dans son cheminement? La conjoncture particulière dans laquelle sont nés les centres culturels est déjà un indicateur de la motivation première qui sous-tend la création d'un tel réseau. Cette période constitue un moment privilégié de remise en question et de redéfinition de l'identité culturelle des Canadiens français. Elle correspond à l'époque des artistes engagés. On voit défiler sur scène les Paiement, Paquette, Dalpé. Que ce soit par la musique de CANO ou de Garoulou, le théâtre du Nouvel Ontario ou de la Vieille 17, la poésie de Desbiens, les artistes et artisans se font vibrants. Une nouvelle francité s'affiche , fière de son passé mais résolument tournée vers l'avenir. Les centres voient ainsi le jour dans ce contexte de renouveau culturel. Ces manifestations marquent l'avènement de transformations bien plus profondes liées à la modernisation et à l'internationalisation rapide de 18 ARTISANS DE LA MODERNITÉ la francophonie canadienne. Les francophones de l'Ontario se retrouvent ainsi à un tournant décisif de leur cheminement collectif. La préservation de l'identité et du mode de vie traditionnel canadien-français ne constitue plus une option viable. L'éclatement de l'encadrement paroissial entraîne la perte des lieux traditionnels de socialisation. Les frontières qui isolaient le groupe tendent à disparaître. L'intégration aux rouages de la société ontarienne devient une question de survie. Face à cette réalité nouvelle, les francophones s'interrogent très sérieusement sur la cohésion du groupe. Comment donc prendre part à la modernité tout en conservant une identit é distincte? Dans ce contexte, le centre culturel se présente comme une institution moderne, typique à la francophonie ontarienne. Il s'agit, à mon avis, d'une réponse originale mise de l'avant par le groupe face aux pressionsexercées par la modernité. En quoi s'agit-il d'une réponse particulière du groupe minoritaire ? Comment le centre s'est-il transformédans ce contexte particulier ? Pour bien saisir l'enjeu d'une telle problématique, il est d'abord important de préciser en quoi la modernisation pose un défi particulier à la collectivité et, par conséquent, de circonscrire le concept de modernité dans le cadre de la présente étude. L'analyse de la modernité se définit ici dans l'axe typologique qui oppose les notions de «communalisation» et de «sociation». Weber définit la communalisation en tant que relation sociale qui se fonde sur un sentiment subjectif d'appartenance à une même communauté. Une relation de sociation repose plutôt sur un compromis d'intérêts entre les acteurs sociaux1 . Les rapports sociaux contenus dans les formations sociales actuelles s'articulent davantage à partir d'activités sociétisées, c'est-à-dire à partir de relations contractuelles entre les intervenants. Ainsi, l'acteur n'appr éhende plus tout d'abord la réalité en fonction du bien de la communaut é comme entité, mais plutôt en fonction d'intérêts particuliers. Il est au centre de l'activité sociale; les rapports qu'il entretient sont le fruit de négociations continues. Par ailleurs, il n'est plus membre d'une seule communaut é, mais s'identifie à plusieurs2 . Dans le contexte d'une minorité culturelle , ceci pose un sérieux défi à la collectivité : aux pressionsextérieures vers l'intégration au groupe dominant s'ajoutent les pressions internes marqu ées par l'éclatement d'une identité globale. Il importe de saisir, à l'intérieur de ces nouveaux paramètres, quels sont les éléments constitutifs qui assurent au groupe une certaine coh...

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