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  • Tourisme et Grande Guerre. Voyage(s) sur un front historique méconnu (1914–2019) by Yves-Marie Évanno et Johan Vincent
  • Romain Fathi
Yves-Marie Évanno et Johan Vincent (dir.), Tourisme et Grande Guerre. Voyage(s) sur un front historique méconnu (1914–2019), Plœmeur, Codex, 2019, 446 p. Préface d’Emmanuelle Cronier.

Cet ouvrage collectif est à la fois une synthèse, un tour d’horizon et un apport historiographique consacrés à différents aspects du secteur touristique étudiés au prisme de la Première Guerre mondiale. Tourisme en guerre, de guerre, commémoratif, le sous-titre de l’ouvrage annonce couvrir la période 1914–2019, mais le volume propose en réalité quelques chapitres qui réintègrent judicieusement la rupture provoquée par la Grande Guerre dans une histoire du tourisme depuis la fin du xixesiècle.

L’ouvrage se divise en vingt-huit chapitres plutôt succincts, articulés autour de trois thèmes principaux : le tourisme pendant la Grande Guerre, les transformations liées à la sortie de guerre, enfin le tourisme que nous pourrions qualifier de mémoriel. Les chapitres mettent en lumière des aspects peu connus et souvent peu étudiés du tourisme pendant la Première Guerre mondiale qui, nous l’espérons, [End Page 145] ouvriront la voie à des travaux plus systématiques portant sur ces objets d’étude. Les auteurs sont tantôt historiens, tantôt universitaires issus d’autres disciplines, ou encore professionnels du monde du tourisme. Malgré les disparités archivistiques et/ou méthodologiques qui peuvent poindre çà et là, l’ouvrage demeure cohérent et progresse de façon chronologique. Les textes proposés en français, anglais et espagnol, couvrent de multiples régions de plusieurs pays (France, Grande-Bretagne, Portugal, Suisse, Autriche, etc.), avec des études souvent locales et fort détaillées.

Le principal apport du livre, comme le note Emmanuelle Cronier dans sa pré-face, est qu’il « connecte l’histoire du développement touristique à celle de la Grande Guerre » (p. 11). Il ne s’agit pas simplement de comprendre comment l’industrie du tourisme a fait face à la Grande Guerre, mais bien d’esquisser comment elle s’y est adaptée, les transformations qu’elle a opérées pour subsister ou se développer, et à cet égard l’enquête menée au travers d’une grande diversité de chapitres se révèle fructueuse. En effet, si de nombreux travaux ont analysé le tourisme de guerre et le tourisme commémoratif, en particulier au sein des nations ayant fait partie de l’Empire britannique, bien moins nombreux sont ceux qui ont considéré le tourisme et son industriependant la Grande Guerre du point de vue des acteurs de ce secteur, et comment ces derniers ont été affectés par le conflit. Le livre s’inscrit dans cette seconde catégorie, et il convient de noter que ces problématiques sont bien connues des historiens Yves-Marie Évanno et Johan Vincent, à l’initiative de Tourisme et Grande Guerre4.

D’emblée, il faut souligner qu’alors même que l’Europe plonge dans la guerre, le tourisme perdure. Certes, ses activités sont perturbées par les mobilisations, mais les lieux de villégiature demeurent populaires, non seulement durant l’été 1914, malgré des baisses parfois significatives de fréquentation, mais également tout au long du conflit. Il faut cependant s’adapter à celui-ci et le livre montre habilement comment l’industrie du tourisme résiste aux perturbations et utilise le patriotisme à son avantage pour contrer les critiques qui ont pu lui être faites pendant la guerre. En effet, comment pourrait-on accepter le plaisir, voire l’oisiveté de certains quand d’autres sont au front et que toutes les énergies du pays doivent se porter vers la victoire ?

Si l’Europe subit de plein fouet l’absence de touristes américains et les entraves que la guerre fait peser sur le secteur du transport, dont l’industrie du tourisme dépend en partie, cette dernière s’adapte rapidement à la situation. Les cartes des restaurants suisses, par exemple, sont revues pour...

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