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Reviewed by:
  • Les XIXes siècles de Roland Barthes by José-Luis Diaz and Mathilde Labbé
  • Alexandre Burin
Les XIXes siècles de Roland Barthes. Études réunies et présentées par José-Luis Diaz et Mathilde Labbé. (Réflexions faites.) Bruxelles: Les Impressions nouvelles, 2019. 272 pp.

'Être d'avant-garde, c'est savoir ce qui est mort; être d'arrière-garde, c'est l'aimer encore: j'aime le romanesque mais je sais que le roman est mort' (Roland Barthes, 'Réponses', Tel quel (1971)). Voilà qui pourrait définir le rapport de Barthes à la littérature du dix-neuvième siècle: 'à l'arrière-garde de l'avant-garde', il consacre de nombreux textes aux auteurs du siècle précédent. Il n'est donc pas surprenant de voir réunis dans ce volume douze études qui ensemble visent à évaluer le rapport de Barthes au dix-neuvième siècle, d'une manière panoramique—ce que José-Luis Diaz, dans son Introduction, nomme finement la 'toureiffelisation du XIXe siècle chez Barthes' (p. 8). Une question se pose d'emblée: quels sont les modes de présence du dix-neuvième siècle dans l'œuvre critique de Barthes? Et, d'ailleurs, quel dix-neuvième siècle? Un siècle clivé, puisque Barthes oppose lui aussi romantisme et modernité. Bien qu'il y ait chez Barthes une résistance à l'histoire et à l'histoire littéraire, force est de constater qu'il existe chez lui des 'panoramas barthésiens' du dix-neuvième siècle (p. 22); il procède ainsi, en y creusant par pulsions historiques, à une atomisation du siècle par focalisation changeante (une date particulière; l'émergence conjointe de deux faits culturels contemporains comme l'histoire et la photographie par exemple) mais aussi par gros plans: en l'occurrence, les articles consacrés à des auteurs particuliers. Ce qui pousse Barthes à 'moduler, sentimentaliser ses XIXes siècles' (p. 36)—car si Barthes le structuraliste est antiromantique, il n'en reste pas moins que le romantisme revient dans ses textes, pendant et après Fragments du discours amoureux, La Chambre claire et les trois derniers séminaires, notamment La Préparation du roman (Éric Lecler) et avec Stendhal (Philippe Berthier) et Chateaubriand (Philippe Roger). La relation de Barthes à la littérature du dix-neuvième siècle est donc plurielle. On retrouve ainsi, dans ce volume, les figures 'importantes': Michelet (le seul auteur que Barthes lit intégralement et qui remplit dans sa formation intellectuelle, selon Paule Petitier, 'le rôle d'un objet transitionnel', p. 88); Flaubert (les deux partagent ce goût pour l'objet-phrase et Françoise Gaillard parle 'd'identification imaginaire' de Barthes à Flaubert, p. 182); et Balzac sous ses différents visages ('pré-moderne, anti-moderne, moderne malgré lui, autrement moderne', comme le note Jacques-David Ebguy, p. 147); voire Flaubert et Balzac ensemble pour la recherche du sens—notamment dans la lecture que Balzac fait de Sarrasine et Bouvard et Pécuchet (Qian Sun). Mais l'on y découvre aussi la présence constante de Baudelaire malgré l'absence d'un moment baudelairien (Mathilde Labbé et la notion d''emphase', p. 211), et le rapport de citations de Barthes à Zola (Philippe Hamon)—pas si éloigné du rapport que Barthes entretient avec Nietzsche, chez qui il puise 'une méthode plus qu'un contenu' (Vincent Vivès, p. 240). Au final, il semble que Barthes cherche dans ses dix-neuvièmes siècles des complices, des figures tutélaires auxquelles il peut s'identifier: 'La relation de Roland Barthes à la littérature du dix-neuvième siècle est plurielle en raison de la différence des rôles attribués aux écrivains lus dans son œuvre' (Anne Herschberg-Pierrot). Comme ce volume le montre remarquablement bien, il y façonne une œuvre et un imaginaire. [End Page 503]

Alexandre Burin
Durham University
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