In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Reviewed by:
  • Interpellation(s). Enjeux de l'écriture au « tu » dir. by Isabelle Boisclair et Karine Rosso
  • Adina Balint (bio)
Interpellation(s). Enjeux de l'écriture au « tu », s. la dir. Isabelle Boisclair et Karine Rosso, Montréal, Nota bene, 2018, 233 p.

Le volume collectif Interpellation(s). Enjeux de l'écriture au « tu », sous la direction d'Isabelle Boisclair et Karine Rosso, explore différents emplois du [End Page 377] mode de narration à la deuxième personne du singulier comme manières d'admettre les « transformations dans les façons de penser le sujet, de le figurer, de le mettre en scène, le faire parler ». Si l'ouvrage est divisé en huit chapitres auxquels s'ajoute un texte de création, le lecteur/la lectrice peut dégager deux axes: un qui aborde dans une perspective critique, l'incidence des récits narrés à la deuxième personne sur l'extrême contemporain, et l'autre qui analyse, dans une perspective philosophique et réflexive, les mécanismes d'écriture spécifiques à cette forme de narration. Après un bref survol des textes contemporains écrits au tu au Québec et sur la scène francophone, le but des articles réunis ici est d'amorcer des réflexions sur l'écriture au tu, de même que sur la portée de cette instance narrative sur le temps du récit, les jeux esthétiques, la conception du sujet et les effets de lecture. Notons que jusqu'à présent, peu de chercheurs se sont intéressés aux modalités d'écriture et aux implications narratives de cette configuration énonciative. Les théoriciens de la narratologie, comme Gérard Genette ou Gerald Prince, ont très peu abordé ce type de voix dans leurs études, et quand ils l'ont fait, ils l'ont traité comme une « variante moderne du récit hétérodiégétique ». Le présent ouvrage propose d'approfondir la réflexion sur cette question.

La première partie de l'ouvrage « Jeux de miroirs, jeu de véridiction » analyse les jeux formels qui résonnent avec les jeux identitaires, tout en soulignant que l'un et l'autre se répondent en écho et qu'ils interrogent la stabilité des sujets convoqués devant le miroir du tu. En ouverture, l'article de Daniel Seixa Oliveira, intitulé « Le récit écrit à la deuxième personne: un dispositif discursif invraisemblable? », analyse divers enjeux narratifs et poétiques à partir d'un vaste corpus de textes en se penchant sur le caractère de vraisemblance dont ils sont porteurs. L'auteur montre que la narration à la deuxième personne déroge à la représentation mimétique puisqu'elle permet de mettre en relief des « situations narratives inexistantes dans le monde réel ». Il en ressort que la mimésis relève moins du procédé narratif lui-même que de la perception du lecteur/de la lectrice.

Dans un autre article de la même partie, « La peau du groupe: mélancolie et subjectivation politique chez Kim Doré, Carole David et René Lapierre », Ève Dubois-Bergeron soutient pour sa part que les œuvres poétiques très différentes de Kim Doré, Carole David et René Lapierre nous convient à un contrat de lecture soutenu par un mode de subjectivation qui interpelle, à travers un tu, un lecteur/une lectrice susceptible de se muer en nous. Ainsi, il apparaît que les textes suscitent la reconnaissance intersubjective et la transmission des émotions. De même, dans l'article d'Adrien Rannaud, « "Non qu'importe ce que j'écris, mais que j'écrive". Poétique du balbutiement dans La convention (1985) de Suzanne Lamy », sont mis en lumière les multiples plans d'énonciation et des voix qui s'interpellent les unes les autres afin de créer un espace de transmission de discours et de savoirs d'un je à un tu et d'un tu à un je, qui font figure de communauté. [End Page 378]

La deuxième partie du volume se tisse autour de quatre analyses examinant les frontières entre autobiographies et biographies écrites par des femmes. Il est évident que les voix...

pdf

Share