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  • Espaces critiques: écrire sur la littérature et les autres arts au Québec (1920–1960) dir. by de Karine Cellard et Vincent Lambert
  • David Dorais (bio)
Espaces critiques: écrire sur la littérature et les autres arts au Québec (1920–1960), s. la dir. de Karine Cellard et Vincent Lambert, Québec, Presses de l'Université Laval, 2018, 394 p.

On peut avoir tendance à oublier que la littérature québécoise, si elle a été jadis une « littérature qui se fait » (selon l'expression de Gilles Marcotte), s'est faite entre autres grâce au concours de l'institution critique. En effet, toute critique littéraire vise à fournir un premier commentaire aux oeuvres publiées, à offrir des critères à l'aune desquels le public pourra lui-même poser un jugement, à opérer une sélection des titres ou à identifier des tendances notables, à plus forte raison dans un contexte de littérature minoritaire. Pourtant, comme le notent les directeurs du collectif Espaces critiques, Karine Cellard et Vincent Lambert, l'histoire de la critique a été peu étudiée au Québec, notamment en ce qui concerne les décennies précédant la Révolution tranquille. C'est à cette lacune qu'entend remédier l'ensemble des collaborateurs de cet ouvrage.

S'il existe des études sur la critique littéraire au Québec, elles rencontrent généralement l'un ou l'autre des trois problèmes suivants: soit elles négligent la période allant de 1920 à 1960; soit elles s'en tiennent aux textes parus en recueils (et non dans les périodiques); soit elles se cantonnent à la sphère [End Page 357] littéraire et omettent de faire un pont avec la critique traitant d'autres arts à la même époque. Les textes figurant dans le collectif remédient tous, d'une manière ou d'une autre, à ces manques. D'abord, ils s'attardent à la première moitié du xxe siècle et nous permettent de découvrir (ou de redécouvrir sous un nouveau jour) certaines figures de notre histoire littéraire; on s'aperçoit ainsi que Claude Gauvreau, parallèlement à son écriture poétique et dramaturgique iconoclaste, a eu une pratique critique sérieuse et engagée envers l'authenticité du théâtre, qui passait pour lui par la cohérence interne de l'objet esthétique. Ensuite, les contributeurs au collectif se sont donné la peine d'explorer le vaste corpus des journaux et des revues parus durant la période couverte. Le texte de Michel Lacroix montre bien ce qu'une telle méthode a d'éclairant: alors qu'on juge traditionnellement qu'il existe un vide dans la critique des années 1930 aux années 1960, le professeur d'études littéraires de l'UQÀM démontre qu'il y a au contraire une transformation et une diversification de la parole critique qui se produit dans les revues. Enfin, certains auteurs nous font découvrir des domaines parallèles à la critique littéraire canadienne-française, que ce soit la critique théâtrale anglophone de Montréal (Lorne Huston), la critique de jazz dans l'entre-deux-guerres (Sandra P. Bouliane) ou la correspondance d'écrivaines comme Simone Routier et Jovette Bernier avec le grand Louis Dantin (Stéphanie Bernier et Pierre Hébert).

Le « cadrage » présidant au choix des sujets de recherche est souple: certains articles « en gros plan » se concentrent sur une seule personne; d'autres, « panoramiques », embrassent une longue période pour tâcher de saisir un mouvement général. Parmi les contributions se penchant sur un acteur en particulier, celle de Claudia Raby a le mérite de porter à notre attention la carrière et la pensée de Jeanne Lapointe. Celle qui deviendra la première femme professeure titulaire à la Faculté des lettres de l'Université Laval exprime déjà, dans un mémoire présenté en 1958, la nécessité de contrer le conservatisme clérical et de faire valoir un humanisme critique et revendicateur, position qui se prolongera chez elle dans la psychanalyse et le féminisme. Pour Lapointe, la critique...

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