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Reviewed by:
  • Et toujours en été par Julie Wolkenstein
  • Didier Bertrand
Wolkenstein, Julie. Et toujours en été. P.O.L, 2020. ISBN 978-2-8180-4967-9. Pp. 224.

Il s'agit d'une sorte de "nouveau nouveau roman" ou d'un roman expérimental, dans le sens où la narration est plus guidée par une expérimentation sur le style que sur aucune logique interne (chronologique ou autre). On pense à La route des Flandres (1960) de Claude Simon, dont le motif est un trèfle à quatre feuilles, au centre duquel on retrouve toujours un cheval mort. On pense aussi au Château des destins croisés (1973) d'Italo Calvino, où la narration se fait par le travers de plusieurs lectures d'un jeu de tarots. Ce roman rappelle aussi l'écriture ludique de Georges Perec dans La disparition (1969) (de la lettre "e"). Dans Et toujours en été, non seulement sommesnous invités à la découverte quasi filmique (on dirait même un documentaire) de la maison de vacances de la narratrice, mais cette dernière nous projette dans un jeu vidéo du type escape game, dans lequel nous devons cliquer sur divers objets trouvés à chaque coin tourné, objets qui recèlent les indices permettant de sortir de cet endroit. "Vous pouvez activer certains éléments du décor en cliquant dessus. Dans la plupart des jeux, […], la petite flèche balaie l'écran, les éléments du décor sur lesquels vous pouvez agir, et seulement ceux-là, se signalent par une légère phosphorescence" (9). Julie Wolkenstein, née Julie Poirot-Delpech et fille de l'académicien Bertrand Poirot-Delpech, semble vouloir inviter son lecteur et sa lectrice à sa propre Recherche du temps perdu. Le prétexte de cette recherche, c'est la maison secondaire familiale, située à Saint-Pair-sur-Mer dans le département de la Manche. Ici, en vacances, Julie retrouve tous ses souvenirs, depuis son enfance, le divorce de ses parents, jusqu'à la mort de son père en 2006 suivie de celle de son demi-frère. La nouvelle génération—ses fils—occupent les dernières pages. La continuité du roman semble assurée par la description minutieuse de cette maison qui est chère à l'auteure, mais une série d'événements humains y prennent une importance dramatique croissante au fur et à mesure qu'on se plonge dans le texte. Après un "TuToriel" [sic] (9) pour nous faire comprendre les règles du jeu vidéo auquel nous sommes conviés, la narratrice décrit minutieusement tous les détails de la maison, de l'entrée à la cave, jusqu'aux chambres aux étages. Les événements humains qui se révèlent au détour de chaque page paraissent d'abord inconséquents mais gagnent peu à peu en intensité émotionnelle. On se prend au jeu. Cette maison où la famille invite les amis, d'année en année, à passer quelques jours à se détendre pour échapper à la vie éprouvante de la capitale, devient l'endroit où les lecteurs se sentent invités et inclus. Plutôt que d'écrire une autobiographie directe [End Page 279] sous la lumière brutale des projecteurs, Wolkenstein nous convie à l'accompagner dans un endroit qui lui est cher, et à y partager avec elle, et avec combien de pudeur, le récit doux-amer d'une vie qui, tout compte fait, respire le bonheur.

Didier Bertrand
Indiana University-Purdue University Indianapolis
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