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Reviewed by:
  • Le courage des autres par Hugo Boris
  • Lydia Belatèche
Boris, Hugo. Le courage des autres. Grasset, 2020. ISBN 978-2-246-82059-8. Pp. 180.

À l'ère de la distanciation sociale, un livre qui nous invite à prendre le métro à Paris serait le bienvenu. Vissés à nos fauteuils, nous avons l'occasion d'explorer un nouveau genre de littérature selon l'auteur dans un entretien publié dans Le Monde du 16 février: "ce n'est pas un roman, ce n'est pas un journal, une autobiographie, un essai. C'est un butin que j'ai amassé, un herbier. Dans le mot herbier, il y a une notion médicale qui contient l'idée de se guérir". Le "butin" dont il s'agit consiste en 15 ans de souvenirs de voyages en métro qui s'entassent dans une "pochette en carton recyclé" qui se trouve "dans le coin nord-ouest de mon bureau" (9). Dans ce "foutoir innommable" (9), l'auteur a collectionné des bouts de papier épars sur lesquels il a écrit ses aventures dans le métro. Boris veut se guérir de sa lâcheté. Son autoportrait sert à souligner son inaptitude à protéger les autres passagers qui sont harcelés dans les transports en commun. Ayant obtenu une "ceinture noire de karaté" (17), il décrit la beauté de s'entraîner dans l'autodéfense. Or, paradoxalement, sa ceinture noire n'est qu'un "mensonge impardonnable" (23). Cette partie du livre rappelle le film américain The Art of Self-Defense (2019) dans lequel un jeune homme considère lui aussi le karaté comme un remède à la lâcheté. Boris déplore le fait qu'il vit dans un "état de sidération pathologique devant la violence" (10), qui le fait adopter une stratégie typique pour éviter des conflits dans le métro: "Je baisse les yeux pour devenir invisible" (67). À d'autres moments, le narrateur choisit de descendre du métro au mauvais arrêt et, quand il marche dans des rues peu familières, il écrit: "Je sens bien que je ne devrais pas être là" (68). Les passagers, violents ou pas, qui entourent le narrateur, forment "un vaste brassage géographique et social, l'opportunité de quitter momentanément sa famille, sa région" (11). La catégorisation des passagers dans le métro par classe sociale, âge, sexe, et surtout par ethnicité, n'est pas gratuite. Ce dernier détail de l'ethnicité ne fait que renforcer la lâcheté du narrateur, comme dans la description d'un "Arabe d'une quarantaine d'années" (138) qui devient un héros dans le métro—ce dont le narrateur est incapable. Cette réduction de l'Arabe à son ethnicité, et sa perception comme un citoyen de deuxième ordre, évoque l'Arabe anonyme dans L'étranger d'Albert Camus. L'emploi du conditionnel passé, qui exprime un acte manqué, nous invite à dépasser le rôle de témoin quand on est en public: "Il [l'Arabe] a fait ce qu'il fallait faire, ce que j'aurais dû faire" (140). Mais on pourrait pardonner au narrateur [End Page 257] sa lâcheté quand il prétexte sa propre "invisibilité bourgeoise" et aussi sa "conscience de classe complètement assumée" (128), parce que son admiration pour le courage des autres à travers les grands et les petits actes d'héroïsme observés dans le métro nous rappelle qu'on a toujours le choix d'aider et de soutenir les autres.

Lydia Belatèche
University of Minnesota
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