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  • OULIPO: chroniques des années héroïques (1978–2018) par Jean-Jacques Thomas
  • Andisheh Ghaderi
Thomas, Jean-Jacques. OULIPO: chroniques des années héroïques (1978–2018). PU du Nouveau Monde, 2019. ISBN 978-1-9370-3092-6. Pp. 510.

Thomas a accompli un projet d'autocritique, au cours duquel il a transformé ses recherches précoces sur l'Oulipo en un ensemble unifié et mieux structuré. L'auteur, en situant l'Oulipo dans son époque, le distingue des mouvements littéraires mitoyens et propose une définition intégrale de ce mouvement. Selon lui, l'Oulipo se targue d'une littérature avec une dimension achronique et transhistorique qui appartient à un présent futur. Ainsi, l'Oulipo, qui n'est pas une littérature aléatoire, propose une possibilité d'épuiser toutes sortes d'expérimentations littéraires et se situe dans un continuum. Cette expérimentation se réalise à base d'un épuisement de la matière verbale et des règles combinatoires de la langue. Selon Thomas, l'Oulipo est un mouvement multigénérationnel dans lequel—à l'encontre du dadaïsme—le nouveau n'existe pas. C'est une littérature accessible à celui qui veut se débarrasser des formes et des procédés littéraires préétablis pour dépeindre une cause commune. Thomas applique la métaphore des rats dans un labyrinthe pour expliquer la différence entre les oulipiens et les autres littéraires. L'Oulipo encourage ses écrivains à échapper au [End Page 237] labeur fastidieux de la fatalité littéraire établie par les autres mouvements littéraires ou des buts politiques de la société qui régnaient sur le conscient des écrivains, comme Camus et Sartre. Loin de là, l'Oulipo invite à explorer des capacités langagières au cours d'un projet autofictionnel. Ces potentiels langagiers se trouvent dans la langue mathématisable qui rapproche la narration d'un "zéro de l'indifférence" (236) exempt de subjectivité, dans un style ludique. Ce style ludique ne dote pas l'Oulipo d'un aspect frivole, mais au contraire, lui donne la frugalité d'une activité intellectuelle qui dénonce tous contrôles, soit de la part de l'inconscient humain, soit de la société en opposition au surréalisme. L'Oulipo propose une littérature à contraintes. De ce fait, écrire est d'abord l'art de se soumettre à des contraintes logiques formelles autant que la capacité d'ignorer l'instable inspiration qui auparavant pouvait mener des poètes au suicide. L'Oulipo, étant un enfant de l'après-guerre, a pour objectif principal la catharsis. L'auteur est bien l'inspiration de son écriture et donc la seule contrainte légitime est un projet d'autofiction. Thomas considère l'exemple de Georges Perec, orphelin de guerre, qui emploie les biographèmes en tant que matière d'autofiction. Perec se sert du jeu de la lettre pour surmonter le vide des souvenirs traumatisants des années de guerre. Perec bénéficie des outils technologiques, dans un style technoludique qui lui offre un moment de libération créative. Comme Perec, Jacques Roubaud, un écrivain-mathématicien au coeur du livre de Thomas, écrit par le biais des nombres. Dans son oeuvre, le poète, frappé par la folie de compter, essaie de combattre le hasard du souvenir traumatisant. Thomas suggère que l'Oulipo se sert de la littérature comme un moyen de suppression du passé traumatique, grâce à la matière littéraire qui se substitue au vide créé par le traumatisme.

Andisheh Ghaderi
University of Kansas
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