Sous Influence

Une réflexion sur l'acte photographique du portrait. En reportage ou en documentaire, la géopolitique des lieux conditionnera l'axe ou le point de vue du regard. La photographie devient une construction, pour ne laisser paraître généralement qu'un sentiment, déjà déterminé par l'état d'esprit du regardant. Le cadrage serré du portrait exclut toute forme d'emprise sur les conditions physiques de vie du personnage. Seule apparaît l'intensité d'un regard, d'une expression, accompagnée de marques, de traces, qui laissent à l'imaginaire le soin de comprendre ou d'habiter une histoire. Dans les mises en scène entre les lieux et les personnes la construction de l'image prend une autre forme, plus personnelle. À la fois engagée et poétique, sans effleurer, sans dévoiler l'intimité. Mon regard photographique « social, sociétal, ou humaniste » ne cherche qu'à décrire ou analyser les mécanismes de construction de groupes sociaux. Quelle influence a le lieu de vie sur le comportement individuel? Quelle influence a le discours politique, les croyances, sur les comportements psychiques, moraux, d'un groupe social ? Quelle influence a l'histoire, préalablement définie, sur la vision et la projection de soi d'un individu ou d'un groupe social ? Quelles en sont les conséquences ? Dans nos sociétés caribéennes, le mystique ou la croyance est un facteur essentiel de la construction de soi, un refuge intime. Sous influence est une expérience photographique, menée à l'inverse d'une construction d'image. Ni lieux ni groupes sociaux à photographier, mais plutôt une forme d'écriture automatique, et systématique, prenant appui sur le mystique ou la croyance, jouant de subtiles manipulations, de l'esprit, dans le but d'observer, de voir, de prendre, de photographier, et de tenter de rendre lisible « l'intime » . Inspiré par le titre d'une chanson, "Unintended Consequences" (« Conséquences inattendues »), lors des prises de vue, je passe systématiquement la même bande sonore, tournant en boucle. J'invite mon sujet à s'enduire seul, sans direction, d'une poudre de charbon. L'idée étant de l'amener à s'effacer, en transformant l'idée de son image, laissant révéler les traces ou marques d'un vécu. L'atmosphère musical influence et amène chaque sujet à une attitude, un comportement. La collecte et l'association d'images me transportent hors des corps, des traces physiques, mais probablement dans un intime, chargé de drames, porteur de forces et d'espoir, déjà inscrit, enfoui dans un inconscient peu révélé.

Sous influence is a reflection on the photographic act of portraiture. In reporting or documentary, the geopolitics of places will determine the axis, or the point of view, of the gaze. Photography becomes a construction, generally leaving only a feeling, already determined by the viewer's state of mind. The tight composition of the portrait shuts out any influence of the physical conditions of the subject's life. All that appears is the intensity of a look, an expression, accompanied by marks, traces, that leave to the imagination the ability to understand or inhabit a story. In the staging between places and people, the construction of the image takes another, more personal form. At once engaging and poetic, without touching, without revealing intimacy. My "social, societal, or humanist" photographic gaze seeks only to describe or analyze the mechanisms of social group construction. What influence do lived spaces have on individual behavior? What influence do political discourses and beliefs have on a social group's psychic and moral behaviors? What influence does history, previously defined, have on the view and projection of the self, of an...