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  • Pédagogie interlinguistique:exploiter les transferts en classe
  • Susan Ballinger (bio), Sunny Man Chu Lau (bio), and Claude Quevillon Lacasse (bio)

Le phénomène du transfert de connaissances linguistiques entre les langues des apprenants n'est pas nouveau et retient l'attention des chercheurs depuis longtemps déjà. Adams, Janse et Swain (2002) nous reportent aux écrits de Romains et de Grecs anciens témoignant de leur conscience de l'influence interlinguistique ou du transfert langagier. Odlin et Yu (2016) font remarquer que Wilhelm von Humboldt a été le premier, en 1836, à faire allusion dans ses travaux au transfert linguistique comme phénomène psycholinguistique. Cet intérêt pour le transfert linguistique est de longue date interdisciplinaire et rassemble la neurolinguistique, la psycholinguistique, la psychologie, la politique éducative, la sociolinguistique et l'acquisition d'une langue seconde (ALS). En fait, selon Yu et Odlin (2016), chaque modèle théorique d'ALS tient compte de l'influence interlinguistique à certains égards, ce qui met en lumière combien le transfert est intrinsèque à l'ALS, la logique voulant que l'acquisition de langues supplémentaires exige d'abord l'acquisition d'une langue première et que les apprenants appliqueront inévitablement les notions antérieurement acquises à leur nouvel apprentissage.

Toutefois, malgré six décennies de recherches sur le transfert linguistique, les travaux portant sur les méthodes d'enseignement favorisant ce transfert font toujours « cruellement défaut » (Gutierrez-Mangado, Martínez-Adrián et Gallardo-del-Puerto, 2019, p. xvii). Dans le présent numéro spécial sont proposés des articles destinés à faire progresser nos connaissances relatives à la pédagogie interlinguistique (PIL—XLP), une pédagogie qui favorise l'établissement de liens entre les langues qu'étudient ou connaissent les apprenants, et à son incidence sur l'apprentissage et l'enseignement. Les études empiriques décrites dans ce numéro spécial ont été réalisées dans des contextes canadiens d'enseignement bilingue et d'enseignement de langue seconde (L2), et sont axées soit sur l'utilisation spontanée du transfert par les apprenants comme stratégie d'apprentissage (voir dans le présent numéro les textes de Payant, 2020; de Séror et Gentil, 2020; et de Tibeault et Matheson, 2020), soit sur les interventions pédagogiques dans le cadre desquelles le transfert est consciemment utilisé pour soutenir l'apprentissage linguistique des étudiants (voir dans le présent numéro les textes de Lau, Brosseau, Maegerlein, LeRisbé et Blandford, 2020; de Maynard, Armand et Brissaud, 2020; et de Quevillon Lacasse, 2020). [End Page 278] Ce numéro spécial est le fruit d'un symposium tenu sur le même sujet lors de l'assemblée annuelle de 2019 de l'Association canadienne de linguistique appliquée. Bien que nous ayons eu au départ l'intention d'y intégrer des études de la PIL réalisées en contexte international, nous avons été frappées par le nombre de projets canadiens actuellement en cours en PIL. Ce numéro spécial vise donc à placer sous les projecteurs les multiples efforts canadiens en matière de PIL afin de promouvoir la synergie des recherches ainsi que le dialogue pour ainsi favoriser le dévelopement de la PIL, tant théorique que pratique. Dans l'article qui suit, nous donnerons un aperçu des recherches consacrées au transfert et à sa relation avec l'enseignement bilingue, nous définirons la PIL en parallèle avec d'autres approches pédagogiques faisant intervenir le transfert, et nous analyserons les conclusions des travaux de recherche sur la PIL et les questions que soulèvent actuellement ces résultats.

Définition du transfert

Il est important de nous pencher en premier lieu sur notre emploi du terme transfert. Tous les termes ont un bagage, et trouver ceux qui cernent avec suffisamment d'efficacité la complexité de l'apprentissage des langues, de leur usage et de leur enseignement est un défi continuel. Nous reconnaissons que le terme transfert a des connotations négatives en raison de son association passée avec l'analyse contrastive et la pensée behavioriste (Jarvis et Pavlenko, 2008). De plus...

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