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Reviewed by:
  • Eugène Varlin. Aux origines du mouvement ouvrier by Jacques Rougerie
  • Gilles Candar
Jacques ROUGERIE, Eugène Varlin. Aux origines du mouvement ouvrier, Paris, Éditions du Détour, « Le devenir du passé », 2019, 224 p.

Jacques Rougerie donne à son Eugène Varlin un sous-titre explicite: Aux origines du mouvement ouvrier. À peu près au même moment paraît aux Éditions Libertalia Eugène Varlin, ouvrier relieur 1839-1871, écrits rassemblés et présentés par Michèle Audin, qui comprend aussi une présentation biographique. Ces deux livres s'ajoutent à l'ouvrage de Michel Cordillot, Eugène Varlin, chronique d'un espoir assassiné, publié en 1991 par Les Éditions ouvrières dans la collection « La part des hommes » de Claude Pennetier et qui, revu et augmenté, fut repris en 2016 par les Éditions Spartacus sous le titre Eugène Varlin, internationaliste et communard. À l'approche du cent cinquantième anniversaire de la Commune de Paris, la personnalité de Varlin se révèle incontournable dans l'histoire de ce moment exceptionnel. Le livre de Rougerie paraît du reste dans une collection joliment dénommée « Le devenir du passé », que dirige Michèle Riot-Sarcey.

L'ouvrage retient d'emblée l'attention pour deux raisons: la plus évidente est qu'il provient de l'historien spécialiste universellement reconnu de la Commune de Paris, auteur de référence s'il en est, mais économe de publications livresques et dont chaque parution se trouve dès lors particulièrement signalée et observée. La seconde est son choix de ne pas écrire « une biographie classique », mais d'offrir « pour une large part la chronique du mouvement des sociétés ouvrières de la fin des années 1860 » (p. 11). Jacques Rougerie l'explique en somme par l'état de la documentation disponible sur Varlin et par l'intensité comme la brièveté d'une vie si intimement liée à la cause de l'émancipation ouvrière. Au début de son propre livre, Michel Cordillot notait de même que le destin individuel de Varlin ne pouvait être dissocié de l'histoire du mouvement social de son temps et, en bel écho anticipé, il citait justement Jacques Rougerie: « Varlin, c'est l'écho précieux, exact, irremplaçable, d'un mouvement ouvrier encore incertain, mais qu'il vit en profondeur, qu'il incarne absolument, qu'il suit pas à pas, en même temps qu'il le dirige, pas à pas » (p. 9 de l'édition de 1991).

L'historien de la Commune ne s'attarde pas sur les quelques indications biographiques disponibles sur cet enfant originaire d'un milieu rural de Seine-et-Marne ayant commencé à basculer vers la ville et un travail d'ouvrier d'art, donc dans un milieu populaire instruit et réfléchi, qui a joué un rôle si important dans l'histoire du mouvement ouvrier. Dès 1857, Varlin appartient à la Société civile des ouvriers relieurs et il parfait son instruction en suivant des cours de l'Association philotechnique, à l'instar des bronziers Albert Theisz et Zéphirin Camélinat, eux aussi futurs membres de la Commune, d'Henri Tolain aussi, ce militant ouvrier qui finira député puis sénateur républicain, ou encore d'Émile Landrin, le futur lieutenant de Vaillant. L'auteur privilégie donc l'étude de ce milieu, avec précaution, prudence même, attentif à décrire les nuances des ambiances ou du climat, proudhonien et fouriériste, dans lesquelles se forme le jeune militant. [End Page 159]

Tout se joue en quelques années, quelques dizaines de mois seulement, à partir de 1864. Varlin participe à sa première grève pendant l'été 1864, en faveur de la journée de dix heures, contre douze auparavant. En 1866, il fonde la Société civile d'épargne et de crédit mutuel des ouvriers et ouvrières relieurs et doreurs sur cuivre, qu'il fait adhérer à l'Association internationale des travailleurs (AIT), à laquelle il appartenait personnellement depuis le début de l'année précédente. Il organise en même temps une première société coop...

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