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BERNARD, CLAUDIE. Penser la famille au XIXe siècle (1789–1870). Saint-Etienne: PU de Saint-Etienne, 2007. ISBN 978-2-86272-453-9. Pp. 451. 25 a. Le projet de Claudie Bernard, fort original, analyse depuis le dix-huitième siècle les discours des penseurs sur la famille afin de mettre en lumière ce tournant crucial, entre l’Ancien Régime et l’époque post-révolutionnaire, où le modèle de la famille bourgeoise se met en place. Modèle d’une famille nucléaire, dégagée des réseaux de relations lignagères et communautaires, placée sous l’autorité du père, pour devenir “un ménage mobile, autonome, rassemblé par l’amour autour de la mère et des enfants, ménage qui caractérise aujourd’hui encore notre civilisation industrielle et urbaine” (20). La première partie, “La famille au dixneuvi ème siècle, entre Ancien Régime et modernité”, fait le point sur l’institution familiale vue dans son rôle de médiateur entre l’individu et la Cité. L’auteure appr éhende la famille autour de deux dimensions: la maisonnée (espace) et la lignée (temps) qui croisent les axes de l’alliance et de la filiation. De plus, elle étudie la famille dans ses fonctions sexuelles, économiques, autoritaires et sentimentales . Bernard présente une somme des savoirs sur la famille qui remonte au passé romain et judéo-chrétien pour aller jusqu’à notre époque. Cette partie est un tour de force quant aux connaissances et au pouvoir de synthèse dont l’auteure fait preuve. En particulier, l’examen des origines sémantiques de la terminologie sur la famille est très utile. Toutefois, on peut se demander si sa longueur (164 p.) et son exhaustivité sont absolument nécessaires pour établir, comme le déclare Bernard, “une grille de lecture” s’appuyant sur diverses sciences sociales pour déchiffrer les penseurs du dix-neuvième siècle. Avec “Penser la famille” nous entrons dans le vif du sujet. Bernard découpe “l’imaginaire théorique de la famille” en trois grands ensembles (23): les auteurs conservateurs qui se réclament du nom du Père sous la rubrique du patriarcalisme (Balzac, Bonald) et du phallocentrisme (Proudhon); les contestataires qui ont recours à l’utopisme; et enfin des “formules progressistes” qui affirment non seulement les droits des individus et du citoyen, mais aussi les droits du cœur. La reconnaissance de l’affect entre époux et entre parents et enfants est certainement l’une des grandes révolutions qui perdurent jusqu’à nos jours. Pour clarifier son propos, Bernard a recours à de nombreuses sous-divisions, notamment pour la catégorie des progressistes; elle distingue le paternalisme des Lumières (Rousseau), le réformisme libéral (Hugo et Tocqueville) et le familialisme romantique (Comte et Michelet). A l’intérieur de ces sous-divisions, elle affine encore plus son analyse avec d’autres sous-titres, forgeant même de nouveaux termes tels que le familialisme élégiaque pour Mme de Staël ou le communionisme pour Lamenais et Leroux. Le chapitre sur les modèles contestataires est particulièrement intéressant, peut-être parce qu’on peut y reconnaître en germes certaines revendications très modernes. Bernard distingue trois grands courants: l’utopisme totalitaire, focalisé sur la Cité; l’utopisme libertaire, centré sur le moi; et l’utopisme féministe. A côté de penseurs et penseuses déjà bien connu/e/s comme Fourier, les Saints Simonien/ne/s ou Flora Tristan, Bernard se penche sur des figures moins connues, mais fascinantes comme celle de Joseph Dejacque, inventeur du terme libertaire, qui voit la famille comme le “Sodome de toutes les corruptions” et un “Petit Etat dans lequel l’homme est souverain, la femme et les enfants sujets” (310). Il faut donc abolir le mariage, “cette prostitution légale”, et saper le système par tous les moyens. En bref, l’étude de Bernard, introduite par la magistrale préface d’Yvonne Knibiehler qui en souligne les forces ainsi que quelques faiblesses, propose des 402 FRENCH REVIEW 84.2 analyses d’une rare finesse qui seront...

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