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onomastiques sont bien présentes dans ce roman. Les parents du narrateur l’avaient initialement affublé d’un nom de fille, Zoé, pour ensuite le baptiser d’un nom de garçon, Zoïle, après la naissance. La bien-aimée, quoique femme, porte un prénom masculin, Astrolabe: la vengeance de sa mère contre son père (et un clin d’œil à Abélard et Héloïse). Nothomb fait également circuler le fantasme mégalomane que la Tour Eiffel—en forme de A—aurait été élevée à la mémoire d’une certaine Amélie. En fin de compte, ni les meilleurs arguments de Zoïle, ni même la dégustation de champignons hallucinogènes—qui provoquent une autre sorte de voyage—ne viendront à bout de la froideur d’Astrolabe qui, dévouée à sa charge, restera chaste et inaccessible. Et on soupçonne bien que l’attentat terroriste échouera également. Pourtant, de A à Z, ce roman drôle, teinté de violence, séduira de nombreux lecteurs. Mount Allison University (NB) (Canada) Mark D. Lee QUIGNARD, PASCAL. La Barque silencieuse. Paris: Seuil, 2009. ISBN 978-2-099109-04. Pp. 238. 18 a. Ceci est le sixième volume de Dernier Royaume (une expression empruntée aux Confessions de Saint Augustin), série commencée en 2002 avec Les Ombres errantes, Sur le jadis, et Abîmes, et poursuivie en 2005 avec Les Paradisiaques et Sordidissimes. Son titre fait référence au passage du Styx vers l’enfer, comme le titre du dernier chapitre, “La Barque de Charon”, le confirme. On y retrouve la forme à la fois méditative et onirique, philosophique et fictionnelle, un “dire faux profond” libéré de l’obligation du vrai, que l’auteur a mise au point comme geste de désobéissance culturelle (Les Paradisiaques 252). On y retrouve la division en courts chapitres de longueur variable, de quelques lignes à quelques pages; le geste accumulatif, une “suite de contes [...] de petits romans” (Prière d’insérer); la démarche globalement spéculative, mais au service d’une poétique; le ton didactique et douloureux, contemplatif et révolté, de l’unique voix narrative; le soliloque dont le cheminement inclut la traduction et l’exégèse de textes grecs et latins, de courtes anecdotes historiques porteuses de leçons implicites, des rappels mythologiques et littéraires, des fouilles étymologiques, des raccourcis et des bonds analogiques inattendus, des extrapolations péremptoires, de brefs épisodes autobiographiques. Dans une démarche désormais caractéristique du style quignardien, l’érudition n’y est pas but en soi ni moyen d’accès à un savoir, mais une étape de la quête, de “la recherche d’un mode de vie plus singulier, plus radical, plus profond, sans jugement, sans société, sans dieux” (Prière d’insérer). Il y a comme l’ambition d’un testament poétique dans cette série qui doit comprendre quatorze tomes. Dernier Royaume est la forme littéraire ultime, d’abord parce que ce royaume, celui de la vie terrestre, s’oppose au premier royaume de l’avantnaissance , de la vie utérine, du “Jadis” hors temps dont les humains gardent la nostalgie, et dont les arts—musique, peinture, littérature—véhiculent un savoir implicite (La Nuit sexuelle 258). Ensuite parce que c’est la forme la plus achevée que l’écriture quignardienne ait atteinte. Citons ici la comparaison faite par l’auteur avec une série plus ancienne: Les huit volumes des Petits Traités [Maeght, 1990] étaient constitués de suites baroques d’érudition. Rien n’y était faux [...] L’ensemble de Dernier Royaume est 620 FRENCH REVIEW 84.3 presque le contraire. J’ai eu besoin d’une forme dont je ne puisse en aucun cas être le maître. Une forme océanique, où je cesse de voir l’étendue et l’horizon [...] où l’hallucination, le vrai, le faux, le mensonge sont confondus et surtout ind émêlables [...] Quelque chose à l’intérieur de quoi je ne sois plus capable de réémerger. Quelque chose où mourir (Philosophie 34 [oct.–déc. 2009]: 60–61). Le ton sp...

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