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vaguement d’un marcheur qui lui vend souvent des articles récupérés au rebut, nommé Suvain ou Sarin, “le genre qui fait de longues marches dans les ruelles, les jours de poubelles” (34). Un chapitre sur deux du roman est écrit en italique et daté 1996, dix ans avant la quête du couple. On comprend qu’il s’agit de la confession du photographe accompli, auteur de ces prises de vue fantasques. Un jour, Anne, sa compagne, artiste-peintre tenaillée par la dépression, s’était supprimée. Suicide sinistre, dont il ne s’était jamais remis. Un moment, il en avait même perdu la vue; puis avait cherché à la rappeler. D’où ces photos étranges, prises dans n’importe quelle situation, dans les lieux misérables de leur aventure. Marie voit quelque part une grande photo murale de lèvres attendant un baiser, bien du style de ces épreuves sauvages, mais celle-là bien cadrée. C’est de Tourelle, qui a vendu autrefois des œuvres raffinées. Elle et son ami font la connaissance de Squeeg et de Snake, autre artiste déclassé qui s’occupe des clochards au centre qui les loge. Tous les quatre sont intrigués par ces inconnus. Se pourrait-il que le rôdeur, Tourelle et le marcheur soient complices? Ils décident de fouiller la Paramount pour en avoir le cœur net. C’est une folle équipée dans ce vieil entrep ôt, avec passe-partout et portes défoncées à coups d’épaule. Le roman devient utopique (et bien peu croyable). Il semble que la Paramount communiquait avec le port fluvial par un long souterrain. Anatole Surin, neveu du propriétaire légitime, profite de l’abandon de ces lieux pour y stocker ses collections et y faire même loger des artistes oubliés, comme Tourelle et d’autres, qu’on croit morts. Escomptant vraisemblablement la hausse de la cote future d’œuvres inconnues du public, il les encourage à continuer leur production artistique. Mécène pragmatique , spéculateur au grand cœur ou exploiteur éhonté? On aimerait croire que toutes ces machinations dans des quartiers mal famés sont innocentes. En tout cas, leur lecture est bien agréable. New Mexico State University Jacques M. Laroche GERMAIN, SYLVIE. Hors-champ. Paris: Albin Michel, 2009. ISBN 978-2-226-19398-8. Pp. 196. 15 a. Les images mentales qu’on se crée en lisant le dernier roman de Sylvie Germain sont fascinantes en ce qu’elles évoquent à la fois la création, la mise en place, et l’effacement progressif du personnage principal. Le livre-caméra de Germain sert et soutient le voyeurisme de son lecteur avec tantôt une once de compassion, tantôt une bonne dose de cynisme, et parfois aussi un brin d’humour. Etrange histoire, certes, que celle de ce protagoniste, piètre e-hominien, fruit d’une délicieuse étreinte, une fin d’après-midi d’été, dans un parc, et qui un jour commence à se faner. En sept jours, ce quidam, cet homme en suspens, devient flou, incolore, inodore, transparent. Même les fleurs artificielles ont plus de vie que lui. Il a l’impression “d’être en déséquilibre continuel tant dans sa relation à l’espace que dans celle au temps” (38). L’histoire d’Aurélien est un peu fantastique, effrayante ici et là, souvent poignante. Il n’est en fait pas le seul à s’effacer. Son frère Joël, très amoindri à la suite d’un accident, est lui aussi un futur disparu. Pour lui, la chute est lente et sans retour. Pour le personnage d’Aurélien, il aura suffi d’une courte semaine. Même le marquage des pages qui figurent les 852 FRENCH REVIEW 84.4 sept jours de la disparition contribuent au sentiment de chute: les jours sont indiqués de plus en plus bas sur la page de chaque chapitre. Il existe dans ce roman un intéressant effet de vases communicants: paradoxalement, et c’est peut-être là l’aspect le plus prenant du livre, au fur et à mesure qu’Aurélien disparaît...

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