In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

impulsion, le 30 septembre 2005. Cette fois, c’est vers le sud que le destin l’envoie, à Lourdes, haut lieu de pèlerinages catholiques. Elle rapporte de sa visite la même alternance de photos et de paragraphes sobres. Trente-quatre pages sont dévolues aux soixante-sept guérisons miraculeuses attestées par l’église. Chacune des pathologies vaincues, inscrite en lettres capitales, apparaît sur fond blanc, dans un rectangle à bords argentés. L’ensemble s’apparente à des ex-voto gravés sur du marbre, voire à des cartes. Malgré ces “preuves”, la visiteuse, ne trouvant rien en ces lieux sacrés, erre dans un lacis de conversations insignifiantes. Le texte, clos sur l’injonction des tarots de rentrer à Paris, témoigne d’un même fourvoiement que le précédent. Du patronyme de la voyante: Kristen, qui évoque à la fois le cristal (de la boule) et le Christ, au visage éploré de Calle campée en mater dolorosa sur la couverture du second volume, le lecteur ne manquera pas de s’interroger devant cet énigmatique diptyque louvoyant entre devin et divin. Car ce mélange d’injonctions magiques et d’interventions célestes est étranger à l’œuvre de l’artiste. De plus, le minimalisme de la composition et la série de signes qui conduisent à deux impasses donnent à l’histoire un caractère essentiellement décevant. Enfin, sa publication en plusieurs volumes (le lecteur ne prenant acte du suivant qu’arrivé à la dernière page de celui qu’il tient dans les mains) fait de cette création un feuilleton onéreux qui frôle la supercherie commerciale. Pourtant, cette production est l’une des plus subtiles et des plus douloureuses de Calle. Et ce qu’elle y exprime ne se comprend que par ce qu’elle y omet. Son projet s’élabore en effet durant l’agonie de sa mère, Monique Sindler, qui se meurt d’un cancer du sein. L’imminence de cette fin, à peine évoquée, donne tout son sens et son poids à l’ouvrage. Car dans cette volonté d’anticipation, c’est l’évitement du présent qui se lit. La prolepse temporelle dans laquelle Sophie s’engage comme dans une machine à devancer le temps lui permet d’enjamber la mort. Si elle s’en remet à l’occulte, ce n’est pas en vertu d’une adhésion à un monde supranaturel, mais par volonté d’occulter. Quoi de mieux pour fuir celle qui disparaît que de se rendre sur le lieu de toutes les apparitions? Le texte est donc une réflexion sur la mystification, qu’il expose dès le début en recourant à une astuce visuelle: le folioscope. Les trente-trois pages liminaires du volet inaugural affichent toutes, dans leur coin supérieur droit, une photo légèrement différente des mains de la voyante maniant ses tarots. Le lecteur, s’il les feuillette en cornant d’un doigt leur côté supérieur, comme s’il pressait des cartes pour les décoller, verra dans leur rapide déroulement le mouvement des tarots étalés sur la table. Ainsi, tout en faisant le récit d’une manipulation, Calle montre que l’illusion est dans les mains du joueur. Un troisième volume est à paraître: Où et Quand?–nulle part–. Le titre est sans concession: la prophétie mène à l’égarement. Jadis, Œdipe en fit les frais. Western Washington University Cécile Hanania BONNOT-BANGUI, LUCIENNE. Cabaret sous savonnier. Paris: Présence africaine, 2009. ISBN 978-2-7087-0791-7. Pp. 254. 18 a. Cabaret sous savonnier est le premier roman de Lucienne Bonnot-Bangui. Pour cette romancière d’origine bourguignonne inspirée par ses années vécues au 848 FRENCH REVIEW 84.4 Tchad en tant qu’infirmière, la réussite est tout à la fois littéraire et humaniste. Chaque ligne de son roman porte un regard poétique et infiniment sensible sur le monde, un regard qui ne manque pas, au travers de sa splendeur et de son honnêteté, de gagner notre confiance. On y découvre sous les traits d’Isabelle, une jeune Française, les cinq agendas...

pdf

Share