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CONDÉ, MARYSE. En attendant la montée des eaux. Paris: Lattès, 2010. ISBN 978-2-70963321 -5. Pp. 364. 19 a. Le quatorzième roman de Maryse Condé commence à la Guadeloupe avec la naissance d’une petite fille, Anaïs, dont la mère, Reinette Ovide, est morte en couches, exhibant les marques d’une mort violente. Babakar Traoré, le médecin qui constate le décès, sera le personnage central de l’histoire; il éprouve le sentiment que son destin est lié à l’enfant et la prend en charge. Le compagnon de la mère, Movar Pompilius, comme elle d’origine haïtienne, vient réclamer l’enfant; il se lie d’amitié avec Babakar. Ils décident de rentrer en Haïti pour rechercher la famille d’origine de la mère de l’enfant et leur remettre la petite fille. Arrivés sur l’île, ils logent chez Fouad, hôtelier et aspirant poète, Palestinien exilé en Haïti qui devient le meilleur ami de Babakar. Devenu médecin chef dans un centre médical, Babakar finit par retrouver Estrella, la sœur de la défunte Reinette; Estrella avoue avoir contribué à l’assassinat de sa sœur et du père d’Anaïs afin de protéger la gloire familiale lorsque Reinette avait juré de révéler le passé de leur père, ancien duvaliériste corrompu. Babakar décide de ne pas confier la petite Anaïs à sa tante qui d’ailleurs ne désire aucunement s’en occuper. Quand s’abat le cyclone Hugo, l’hôpital est détruit et le terrain est vendu à un promoteur chinois pour y construire un hôtel de luxe. Babakar a tout perdu, sauf la petite Anaïs, il se prépare à prendre l’avion pour s’exiler aux États-Unis lorsque le tremblement de terre dévastateur de 2010 se produit. Il décide de rester; son ami Fouad, par amitié pour Babakar, par solidarité avec le peuple haïtien, reste pour l’aider: Il faut nous dire adieu, souffla Babakar à Fouad, [...]. Je suis médecin et ne peux plus partir. Ce serait un cas de non-assistance à personne en danger. [...] Fouad le repoussa affectueusement: -Tu es fou! Tu crois que je te laisserais seul ici? Entre nous, c’est à la vie et à la mort. (364) Chaque personnage qui se greffe sur cette histoire amène dans le texte, comme accroché à ce récit central, son propre récit de vie qu’il raconte à la premi ère personne, les récits successifs dessinant une carte de la souffrance, de l’exil et de la persécution qui, contrairement aux cartes politiques n’ont pas de frontières fixes, mais dessinent des flux d’errance, de souffrance et de désirs, du Liban au Mali et en Haïti. Ces récits, selon la réflexion de Babakar, sont des “variations sur le thème de la violence et du déplacement, des variantes d’un schéma qui devenait de plus en plus ordinaire”; lui et ses amis avaient “été emportés dans une spirale d’événements qu’ils ne pouvaient contrôler et qui avait finalement englouti ce qu’ils avaient de plus cher” (224). Aux grandes épopées de guerre et de conquête, Maryse Condé oppose une anti-épopée faite d’antihéros, de nouveaux Ovide, Hector, Minerve, Pompilius, Hugo, peuple d’exilés et d’exclus, malmenés par les états, les intérêts des riches, les valeurs des bonnes gens et le racisme ordinaire . À la patrie, Condé oppose la force de l’amitié, au devoir, elle oppose la solidarité et l’engagement. La famille n’est plus fondée sur les lois du sang, mais sur celle de l’affection. De la propriété, de la définition identitaire, il ne reste rien, juste des hommes et des femmes avec leur désir, leur engagement, leur éthique personnelle, leurs souvenirs et leurs récits: [Babakar] se demandait s’il avait le droit d’entraîner Anaïs dans une nouvelle aventure, de faire d’elle un être comme lui, sans foi ni toit...

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