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À travers son personnage d’emmurée, l’auteur met en scène un Moyen Âge vivant et plausible. Il n’était pas inhabituel à l’époque qu’une jeune fille noble refuse le mariage pour ‘épouser’ Dieu et choisisse le silence à jamais dans son tombeau. Esclamonde, de sa cellule, parle et éprouve le monde dans sa chair et dans son esprit. Elle confronte de grandes questions dont certaines sont encore les nôtres: le désir, la violence sexuelle, la souffrance morale, le regard des autres auquel on ne peut échapper. Elle mesure la difficulté de concilier l’amour humain, et particulièrement l’amour maternel, et la quête spirituelle. Elle dénoue devant nous avec grande sensibilité la condition des femmes au Moyen Âge, qu’elles soient nobles ou serves, sous l’emprise du pouvoir absolu des hommes. Elle montre comment l’élite masculine des seigneurs et chevaliers, eux-mêmes victimes de leurs pouvoirs, est soumise inéluctablement au haut-clergé et à la papauté. Ce roman au ton juste et à la superbe écriture tient le lecteur en haleine jusqu’au bout. Fairfield University (CT) Marie-Agnès Sourieau NOTHOMB, AMÉLIE. Tuer le père. Paris: Albin Michel, 2011. ISBN 978-2-226-22975-5. Pp. 151. 16 a. Si Nothomb a souvent mis en scène des assassinats parfois sanguinolents dans ses romans, Tuer le père n’est pas, contrairement à ce que l’on pourrait croire, un récit de meurtre. Pour son vingtième roman depuis sa première rentrée en 1992, l’auteure franco-belge trempe sa plume moins dans le sang et plus dans la métaphore du jeu et de la magie. Ainsi, les figures parentales du roman ne mourront pas mais seront rudement dupés par le magicien au centre du texte qui joue le rôle de fils. Les lecteurs assisteront alors à la mort affective d’un père adoptif à travers maintes péripéties. Pourtant, les lecteurs suivront-ils Nothomb dans ces tours de passe-passe littéraires? Le roman se compose de quinze chapitres non-numérotés, d’abord très courts, ensuite plus longs, créant ainsi un mouvement d’accélération dans une structure d’enchâssement narratif classique. Tuer le père débute et finit par une narration à la première personne où un ‘je’, attribué à une certaine Amélie Nothomb, curieuse de voir une tension remarquable entre deux inconnus dans une salle de jeu, demande à un tiers anonyme de lui expliquer leurs rapports. Celui-ci reviendra douze ans en arrière pour relater l’histoire de Joe Whip, adolescent délaissé vivant dans le Nevada, et de sa rencontre avec Norman Terence, celui qui deviendra, croit-on, son père d’adoption et son maître dans l’art des tours de cartes. De sa morne jeunesse à Reno aux casinos de Las Vegas, du festival très ‘free love’ de Burning Rock aux tripots du Paris actuel, nous suivons l’évolution d’un garçon pris en charge par un couple séduisant, et qui semble vivre avec eux toutes les émotions que l’on associe à l’adolescence—engouements, haines, passions et expérimentations—y compris, surtout, l’apprentissage des tours de cartes. Très sinon trop doué dans l’art des tours, le jeune Joe sera sujet à la tentation de tricher et de tromper non seulement ses spectateurs, mais également ses proches. Cette possibilité anime alors la majorité des mouvements dans la narration. Certains thèmes nothombiens récurrents sont au rendez-vous dans ce dernier roman: l’obsession onomastique, la présence des orphelins, la transition difficile entre l’adolescence et l’âge adulte. Reviews 425 D’ailleurs, la stratégie au cœur des tours de magie—à savoir faire passer une tromperie sous les yeux des lecteurs alors que leur attention est portée ailleurs— est précisément ce qui a si bien marché dans Une forme de vie en 2010. Pourtant cette fois, lorsque la stratégie narrative est littéralisée dans la narration, la magie n’est pas tout à fait au rendez-vous, et c’est bien dommage. Lecteurs et critiques n’ont...

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