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Nimier, Marie. Je suis un homme. Paris: Gallimard, 2013. ISBN 978-2-07-013817-3. Pp. 233. 17,90 a. Lauréate du prix Médicis 2004 pour La reine du silence, Nimier se glisse cette fois dans la peau d’Alexis Leriche, le personnage principal et narrateur du roman. On retrouve ici plusieurs thèmes chers à cette auteure: l’enfance, la filiation paternelle et la recherche identitaire. Ainsi, dès la première page du roman, le narrateur affirme que“L’enfance n’existe pas”(11) et qu’il s’est senti affublé d’un nom impropre, Leriche, “qui disait le contraire de ce qu’[il] ét[ait]” (11). Il évoque toutefois un “anneau magique” (11) au travers duquel on ferait passer le monde pour qu’il appartienne au passé et laisse la voie libre. Nimier lance ici le défi de passer d’une écriture féminine à une écriture masculine, d’une identité à une autre. Quant à Leriche, après ce préambule qui tient autant de l’introduction que de la conclusion, il se lance dans la narration sans concession et presque sans pudeur de son départ du mauvais pied dans la vie. Il nous dit son patronyme inacceptable qui le prive d’identité, son père boucher, macho, et malheureux en affaires qui délaisse le foyer familial, son frère jaloux, sa demi-sœur cachée, sa mère emportée trop jeune par la maladie, sa scolarité laissée en plan, mais aussi son hyperacousie qui le dérobe au monde extérieur. Au seuil de son avenir, tandis que le monde semble à la fois s’imposer et s’opposer à lui, le bel Alexis Leriche est dans une impasse, figé dans l’égocentrisme passif que nourrit son parcours identitaire, privé de tout élan et incapable de choisir. Alors que Louise, la petite amie de son frère l’initie à l’amour, Antoine, son ami d’école, lui conseille de quitter le logement familial, l’aide à obtenir un emploi dans le casting des voix, l’encourage à créer dans ce domaine sa propre entreprise Au paradis des voix (80), et enfin lui suggère de trouver une compagne. Lorsqu’il retrouve Delphine, elle le fascine car elle représente pour lui la femme idéale, la classe sociale au-dessus. C’est en effet sous son emprise et celle de ces“voix”qui ne sont pas la sienne, qu’Alexis tente d’affirmer tant bien que mal sa masculinité et son identité.Ainsi, les lecteurs trouveront entre les lignes de l’écriture de Nimier, explication ou justification aux actes parfois surprenants de ce personnage campé jusque dans son inconscient. L’auteure réussit un coup de maître en devenant ici, non pas la reine du silence, mais la reine de la voix, sachant créer non seulement une fiction autour du “paradis des voix”, mais aussi une voix masculine unique, celle d’Alexis, dans toute son intimité. Chacun pourra sans doute retrouver un peu de soi à travers cette voix qui sonne juste et dont les intonations rendent finalement attachant ce personnage principal qui, toujours rattrapé par son destin et habitué à voir le monde se dérober sous lui, peut“jouir, et [s’]endormir comme une brute, pour réussir à tout oublier” (214). Pacific University (OR) Jeanne-Sarah de Larquier 280 FRENCH REVIEW 87.2 ...

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