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La dernière partie, intitulée Flower power avant l’heure, s’intéresse aux chansons traitant de la guerre ou de l’émancipation sexuelle. On y montre bien comment le style de Boris Vian se prête à merveille à des textes protestataires au temps de la torture en Algérie et de la décolonisation, comment l’antimilitarisme de Brassens est plus distancié de l’actualité immédiate, tandis que Gainsbourg (qui fut le seul des trois à effectuer son service militaire et qui souffrit directement de l’occupation nazie) ne fait pas de l’antimilitarisme une position de principe même s’il ne manque pas d’efficacité lorsqu’il ridiculise une certaine imagerie militaronationaliste . Pour ce qui concerne l’émancipation sexuelle, l’auteur appauvrit considérablement ses interprétations de textes en adoptant un discours féministe très convenu. Les trois auteurs sont condamnés sans circonstance atténuante pour leurs textes exploitant la sexualité féminine (Gainsbourg), pas suffisamment féministes (Vian), ou bien dans une veine fanfaronne gauloise, dégradante pour la femme (Brassens). Peu après, l’auteur abandonne sa casquette de militant pour reprendre en compte le contexte historique et reconnaît le rôle émancipateur des trois chanteurs, sans chercher à réconcilier ces deux perspectives, ce qui nous laisse sur notre faim. Cependant une étude minutieuse de chansons semble une excellente piste pour qui voudrait approfondir la question de l’émancipation supposée des hommes et des femmes modernes. L’idée de rapprocher ces trois artistes s’avère fertile et ce livre propose de bonnes analyses, ainsi que de bonnes références de textes à relire (je recommande l’excellente interview de Georges Brassens accordée en 1975 à Georges Benhamou pour la French Review). Il permettra aux étudiants de trouver plusieurs pistes de réflexion intéressantes sur le rapport entre chanson et société et de se familiariser avec des textes de chansons solides sans être austères. Il est notamment urgent de redécouvrir les chansons de Boris Vian. Denver Center for International Studies (CO) Christian Roche DÉMIER, FRANCIS. La France de la Restauration (1814–1830): l’impossible retour du passé. Paris: Gallimard, 2012. ISBN 978-2-07-039681-8. Pp. 1095. 14 a. Un ouvrage impressionnant, par ses dimensions comme par ses objectifs, qui traite en profondeur l’histoire politique, économique, sociale et culturelle de la Restauration monarchique. Démier décrit minutieusement l’évolution d’un régime politique empêtré dans ses contradictions, déraisonnablement indécis face à l’inéluctable nécessité de choisir entre l’urgence d’une modernisation économique et la tenace nostalgie de l’Ancien Régime, et donc incapable de réconcilier une société française profondément marquée et transformée par la Révolution et l’Empire avec ce qui restait d’une élite aristocratique qui continuait à s’accrocher à l’illusion d’un “retour du passé”. Alors que la plupart des dirigeants et intellectuels (qu’on me pardonne l’anachronisme) français, conscients du fait que le pays était épuisé—pour ne pas dire exsangue—à cause des incessantes guerres napol éoniennes, espéraient que la Charte octroyée par Louis XVIII deviendrait la base d’une monarchie constitutionnelle stable et relativement libérale (la GrandeBretagne servant le plus souvent de modèle à cet égard), le rétablissement d’un régime politique qui persistait à puiser sa légitimité dans le droit divin n’aura en fin de compte été que de courte durée et n’aura eu que de faibles conséquences durables sur le plan social et institutionnel. Par exemple, comme le souligne Démier, 776 FRENCH REVIEW 86.4 en raison des impératifs économiques, et en dépit de quelques velléités ultracistes, la Restauration n’a pas renversé le mouvement centralisateur de l’État, auquel le régime napoléonien avait donné un coup d’accélérateur décisif: “Le retard de la France sur le terrain manufacturier contraint à organiser un État moderne au service de l’industrialisation” (390). L’auteur fait alterner des sections et des chapitres qui fournissent le suivi des événements politiques (la Restauration est...

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