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Reviews 261 Bantegnie, Gaëlle. Voyage à Bayonne. Paris, Gallimard, 2012. ISBN 978-2-07013839 -5. Pp. 175. 15,90 a. Ce deuxième roman de l’auteure, plein d’humour et d’une grande force d’observation, présente la vie d’Emmanuelle et de son mari, Boris, durant l’été 1998, lors d’un voyage en Clio sur la côte atlantique. Il s’agit d’un couple de jeunes professeurs à la dérive rattrapé par le quotidien et la médiocrité. Il a trompé sa femme— un accord tacite l’y autorisait—et elle en éprouve un sentiment de trahison, malgré ses principes libertaires. Pour changer d’air, un voyage à Pompéi est décidé. Le projet tourne court, ils n’iront que jusqu’à Bayonne, s’arrêtant chez des amis et des parents sur la route. Le texte, écrit sous la forme de notations et d’analyse des gestes, des conversations, des pensées latentes, s’en prend au quotidien et dessine la chaîne de toutes les impressions inexactes, de tous les lieux communs d’une vie remplie de velléités et de projets avortés, qui par inertie s’est installée dans un confort illusoire: “Lire Leibniz ne l’intéressait pas mais quand elle s’y mettait elle aimait sentir la tension de ses muscles et de son cerveau: la concentration. Elle avait décidé de perdre du poids aussi, de faire un régime alimentaire” (8). La crise de confiance résultant de l’adultère révèle à Emmanuelle la médiocrité d’un quotidien dans lequel elle ne peut même pas se réfugier, le trouble détruisant jusqu’à cette normalité tant soit peu rassurante. Dans l’écriture, le malaise d’Emmanuelle se manifeste sous la forme d’une densification de ces notations du quotidien, sorte de paranoïa d’observation qui tisse ses fils et sa trame. Dans le récit, la rupture du normal se concrétise en une grosse araignée presque sympathique que la jeune femme finit par apercevoir partout. Elle voit l’araignée s’installer graduellement en tiers au sein du couple comme une sorte de présence relativement amorphe de ce qui la sépare de Boris:“Dans la pénombre de la chambre, il y avait toujours ce cadre accroché au mur [...]. Elle remarque juste que quelque chose en dépassait, s’échouant le long du mur, une sorte de patte, noire et velue” (35). Le récit résiste volontairement à toute forme de profondeur, se passe de toute forme de totalisation et les personnages presque vidés de toute individualité sont animés, saturés par les lieux communs de leur vie, principalement géographiques tels qu’Angers, Quimper ou Bayonne. Ils définissent selon ceux qui les occupent des types d’attitudes parentales, amicales, relationnelles, avec leur logique, leurs gestes, leurs mots, leurs rythmes. À mesure qu’Emmanuelle et Boris revoient les parents et les amis avec lesquels leur existence est tissée, comparée, mise en résonnance, les époux redessinent leur relation. Pour le couple, le récit se termine par une forme de réconciliation après une rupture qui n’a jamais vraiment eu lieu, la trahison de Boris et la folie d’Emmanuelle qui en a résulté ayant été en quelque sorte intégrées dans leur vie. California State University, San Marcos Marion Geiger ...

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