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Serhane, Abdelhak. L’homme qui marche sur ses fesses. Paris: Seuil, 2013. ISBN 9782 -02-110102-7. Pp. 276. 18 a. Même s’il est devenu professeur à l’université de Louisiane à Lafayette, Abdelhak Serhane est resté l’enfant du Moyen Atlas, chérissant sa ville Azrou et ses amis d’antan. Parmi eux, se trouve le cul-de-jatte Rouida, dont l’infirmité donne le titre du roman, et qui s’apprête à fêter son prochain mariage. De passage au pays, l’écrivain célèbre ses retrouvailles avec la petite bande lors d’une soirée, prétexte pour délier les langues et évoquer certains épisodes importants mais méconnus. Malgré son handicap, Rouida n’a pas peur d’afficher ses opinions sur le régime monarchique totalitaire qui a habitué les Marocains au servage et à “cinquante ans de prosternement” (52). La longue nuit se prête à tout, des réflexions politiques, des grandes envolées de joute poétique invoquant le poète persan Omar Khayyâm aux souvenirs tragiques de vies humaines brisées. Les événements s’enchaînent vite pour attaquer librement et sans censure le pouvoir répressif “qui [les] encule matin et soir avec la tyrannie de ses viles traditions” (34), évoquant le règne du feu Hassan II qui avait plongé son peuple dans“l’inculture et l’obscurantisme” (44), et de celui de son fils Mohamed VI, ce monarque affairiste “qui a mis le pays sous coupe réglée” (43). L’écrivain présente de vifs récits d’êtres malheureux, désespérés et impuissants faisant apparaître le Maroc comme un pays en pleine dérive qu’on voudrait quitter pour aller tenter sa chance dans un ailleurs plus libre et plus prospère. En fait, ses amis s’étonnent de le voir revenir “en touriste” (31) sur le lieu de la misère, lui qui a eu la chance de réussir sa vie ailleurs. Rouida lui reproche d’être un opportuniste, en quête de tragiques histoires pour nourrir son inspiration:“Tu exploites ma vie, alors tu dois cracher un peu de blé” (30).“Tu as fait de nous les héros sans gloire de tes romans, les amandiers morts de ta poésie, la légende pourrie de tes nouvelles” (32). Le personnage questionne le rôle de l’écrivain et de l’exploitation des souffrances observées qui nourrissent son imaginaire. L’homme ne constitue par une écriture nouvelle dans la production romanesque de Serhane, l’écrivain engagé proche du peuple qui dénoncent les maux de la société marocaine. Les habitués de son œuvre retrouveront le ton virulent et vivifiant qu’il utilise depuis Messaouda (1983). En fait, l’écrivain propose ici un roman déroutant marqué par la force de la dénonciation du système monarchique, la dégradation du pays rongé par la corruption, la montée de l’intégrisme, les menaces du terrorisme et l’hypocrisie religieuse. Ce roman provocateur use d’un style où la grossièreté langagière souligne la violence de la révolte que le vin délivre dans la lignée des autres récits que Serhane nous a déjà livrés en contrepoint d’une écriture policée qu’il considère impuissante à restituer les fléaux de la société marocaine. Il n’est pas innocent que la parole soit donnée à un cul-de-jatte qui représente le peuple réduit à l’immobilité mais qui refuse de se taire. Montclair State University (NJ) Rabia Redouane 272 FRENCH REVIEW 87.4 ...

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