In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Reviews 267 se tiennent les réunions pour décider de l’avancement de projets au pays natal ou du financement de funérailles prochaines. L’efficacité de ce roman, visiblement basé sur une expérience directe de l’auteur, tient à sa rigueur littéraire et à la vérité des personnages, qui nous oblige à regarder en face une réalité dérangeante. Son écriture exigeante demande une relecture pour apprécier pleinement la justesse de ton miraculeuse du livre et son impressionnante galerie de sans-papiers. Il peut inspirer d’importantes recherches sur une problématique globale et enrichira aussi bien les études littéraires que les classes de culture et de conversation françaises. Conifer High School (CO) Christian Roche Paventi, Eza. Les souliers de Mandela. Québec: Québec Amérique, 2013. ISBN 978-27644 -2240-3. Pp. 424. $25 Can. Paventi écrit ici un premier roman (sorti peu avant le décès de Mandela) qui imagine la rencontre, en Afrique du Sud, de son personnage fictif, Fleur Fontaine, avec des personnages dits réels. Ce récit raconte surtout la confrontation entre une Afrique rêvée—celle des livres d’images aux couleurs d’ocres et aux animaux sauvages—et une Afrique du Sud qui a survécu à l’apartheid et refuse de stagner. Mais avant tout, menant d’un continent à l’autre, tout près de deux océans qui s’affrontent à la pointe australe de l’Afrique, ou encore vers les mondes divers de Johannesburg, Cape Town, les townships, le parc Kruger, l’enclave du Lesotho, Robben Island, ce voyage symbolise le long parcours intérieur au cœur d’une femme blessée. Fleur arrive en Afrique un peu par hasard sous prétexte de faire, pendant six mois, un stage de reportages divers. En réalité, elle fuit Montréal pour le bout du monde car elle est émotionnellement vidée par une histoire d’amour douloureuse.Initialement,un fort décalage culturel lui donne un sentiment de culpabilité, celui d’être une touriste privilégiée, un voyeur déplacé. Pourtant, dans ce pays qui se veut optimiste malgré la pauvreté des populations noires, le sort des street kids, l’épidémie de sida et d’autres réalités contemporaines, Fleur apprend à dépasser son nombrilisme bourgeois. Peu à peu, au contact d’expériences ou de personnalités fortes et attachantes, sa propre libération a lieu, laborieusement certes, mais à l’instar de celle du père de la nation. En effet, aimer l’Afrique du Sud, c’est percer l’énigme Mandela,connu là-bas par son nom de tribu,Madiba; c’est comprendre que “l’homme qui a marché sur le long chemin vers la liberté” (15) a d’abord réussi à dominer “son impatience et sa haine” puis “s’est entraîné à développer un sentiment d’empathie”; c’est apprendre la langue de l’ennemi pour penser comme lui (17). Pour les Sud-Africains, marcher dans les souliers de Mandela consiste donc à apprendre à vivre par autrui. Fleur comprend à son tour que comme le pays de Madiba, l’individu doit se reconstruire, développer ses projets de travail et de vie malgré ses résidus de peur et de solitude. En se formant à des façons qui ne viennent pas d’Amérique du Nord, de vivre différemment le temps, le travail, l’argent ou l’amour, elle apprend à s’imprégner du formidable effort qu’il faut pour comprendre l’Autre et négocier avec lui; elle saura alors regarder le monde par les yeux du pardon, arriver à un esprit de solidarité et de résilience, et sortir profondément mûrie par l’Afrique. Intercalant un journal intime narré à la première personne et de courts chapitres à la troisième personne qui distancient l’héroïne de son passé à Montréal, Paventi n’évite pas certains poncifs (culpabilité de l’Homme blanc, courage et résilience de figures féminines africaines, rangers qui préfèrent les animaux aux humains, difficultés des couples métisses). C’est en revanche de façon très originale qu’elle nous invite à mieux nous...

pdf

Share