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au début des années 1970, lorsque Marie tombe enceinte de Diane et se marie à dixneuf ans. Le récit s’attarde sur les faits et gestes de cette jeune mère dont l’égoïsme naturel se transforme en une jalousie aussi inconsciente que systématique envers sa fille. Le récit fait ensuite un saut jusqu’en 2007 lorsque Diane, jeune femme indépendante , achève ses études de médecine. À l’exception de la fin du roman, nous ne sommes pas dans une violence ouvertement physique mais dans une agression psychologique et une privation émotive soutenues que l’auteure met à jour avec une grande clarté. L’autre tour de force de Nothomb consiste à plonger—comme elle l’a magistralement fait dans Métaphysique des tubes (2000)—dans l’univers de la toute petite enfance, accordant au bébé Diane l’intelligence et le discernement dont ces petits êtres sont doués et qu’on a souvent tort de ne pas reconnaître. La fille—bébé, enfant puis adolescente—cherche consciemment et inconsciemment à compenser sinon à réparer la relation avec sa mère, avant finalement de fuir. Autre élément remarquable: incapable de se voir ou de s’analyser, la mère n’y est pas excessivement culpabilisée. La fille assume, alors que son père—comme presque toutes les autres figures masculines du roman—demeure le témoin passif, quasi absent, de cette situation. L’ambition de la fille de devenir médecin-cardiologue se présente ainsi comme un moyen de chercher la guérison. Du reste, ce n’est qu’en faculté de médecine, où Diane reproduit sous une autre forme ce rapport nocif avec une femme du même âge que sa mère, que la fille peut vraiment prendre conscience du danger et du poids de ce qu’elle a vécu. Elle rompt alors abruptement ce transfert néfaste. La fin du roman nous réserve une péripétie qui confirme le péril qui la menaçait. Si Frappe-toi le cœur, dont le titre est tiré d’un poème de Musset, semble faire preuve de plusieurs prédilections récurrentes chez cette romancière prolifique—l’onomastique, l’école, la beauté, l’amitié féminine ou l’enfance—ne nous y trompons pas: Nothomb s’engage ici et emmène ses lecteurs dans un territoire inédit qu’elle explore avec maturité, perspicacité et aplomb. Mount Allison University (NB, Canada) Mark D. Lee Quignard, Pascal. Dans ce jardin qu’on aimait. Paris: Grasset, 2017. ISBN 978-2246 -81335-4. Pp. 170. Un homme pieux, de plus en plus mélancolique après la mort prématurée de son épouse, néglige sa fille, devient “ermite solitaire” (66), passant son temps entre la contemplation de la nature dans son jardin et la musique qu’il écrit: c’était l’argument de Tous les matins du monde (1991), qui eut le succès que l’on sait. C’est aussi celui du présent livre. Comme pour le compositeur et joueur de viole Ste-Colombe, une vie authentique inspire le texte. En l’occurrence, celle du chanteur américain Simeon Pease Cheney (1818–1890), dont l’ouvrage Wood Notes Wild (1891) répertorie les mélodies des oiseaux de la Nouvelle-Angleterre et transcrit leurs chants en notation musicale. 218 FRENCH REVIEW 91.4 Reviews 219 Comme à son habitude, Quignard prend des libertés avec l’Histoire. Il la fictionnalise et fait de Cheney un pasteur protestant, vivant à Geneseo, New York (alors qu’il vécut principalement entre le Vermont et le New Hampshire), lui donne une fille qui fait publier son livre à titre posthume et à compte d’auteur (alors que c’est un fils de Cheney, le poète John Vance, qui a édité le manuscrit inachevé et l’a complété de recherches annexes sur les études de chants d’oiseaux). Quignard invente aussi cette épouse morte en couches, Eva Rosalba, et le chagrin irrémédiable de l’époux (alors que Cheney s’est remarié). Les dates de ses activités ornithologiques sont aussi fictives. Ce récit devient ainsi un...

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