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volatile”(64), déclare-t-il. En effet, la magie de l’imagination et des mots opère puisque la vie fictive des personnages finit par ressusciter la vie réelle du peintre, et celle-ci résonne avec des souvenirs d’enfance de l’auteur mêlés aux scènes de la Toussaint et aux images de pêcheurs, de trimardeurs, de ponts, de péniches, de buveurs. Cette dernière correspondance n’a rien d’étonnant étant donné que le peintre et l’écrivain ont tous deux vécu à Nancy—à un siècle d’intervalle, il est vrai—et ont ainsi respiré le même air et vu les mêmes paysages, les mêmes berges et les mêmes canaux. Claudel réinterprète le destin de Friant dans ses toiles. C’est ainsi que la Toussaint célèbre la propre mort du peintre, et la “veuve éplorée de Douleur” se penche sur son “talent exténué” (57). Dans une telle mise en abyme, Claudel se projette dans le destin de Friant sans que le rapprochement frise le délire. Il ressent la même rage qu’on observe dans les premiers tableaux du peintre (58). Il pressent le même destin d’une noyade symbolique (62). Enfin, la biographie de Friant évolue vers l’intimité. Claudel s’adresse directement au peintre qui devient un “copain” (69) et “un frère refusé” (70) dont il révèle les pensées intimes. Ceci dit, au-delà de la ressemblance et de l’illustration d’une destinée humaine, Claudel s’interroge, par le biais de la peinture, sur le sens de l’art et celui de l’écriture. Le succès artistique ne nous sauve pas, affirme l’auteur, pour qui la fréquentation mondaine “nous perd” (57). En outre, Claudel se démarque de la conception de l’art comme gage du salut: “il y a aussi tout ce mal que j’ai fait autour de moi, que d’autres ont fait avant moi, [...] et que mes mots ne rachèteront jamais” (67). Quelle serait donc la mission de l’artiste? Simplement du“ravaudage” (37):“Les couleurs et les mots sont des béquilles ou des échafaudages, des essais maladifs. Des plâtres que l’on essuie sans cesse” (57). Toutefois, l’œuvre d’art reste indispensable parce qu’elle rassure, de la même façon qu’un enfant se rassure lorsque, plongé dans la nuit effrayante de sa chambre, il voit entrer sa mère pour lui donner un baiser (67– 68). Malgré l’ombre de quelques regrets chez l’artiste, les pages finales diffusent une vision de renouveau à travers la figure de la grand-mère, qui“songe en riant que la vie sera pour elle un grand bouquet de roses” (78–79). University of Portland (OR) Khadija Khalifé Damas,Geneviève. Patricia.Paris: Gallimard,2017.ISBN 978-2-07-273179-2.Pp.136. Ce texte s’inscrit dans la lignée des livres consacrés à la situation des sans-papiers. Patricia, française, et Jean, originaire de la République centrafricaine, se sont rencontr és au Canada, où Jean végète depuis une dizaine d’années, ayant pratiquement abandonné les rêves qui l’ont poussé à quitter l’Afrique. Sa rencontre avec Patricia est l’occasion de se remettre à rêver, comme on le répète parmi les clandestins: “Au côté de la femme blanche, l’homme noir ne craint rien. De l’homme blanc tu te méfieras, mais la femme blanche peut tout”(17). Et c’est ce qui se confirme, Patricia ayant décidé qu’“à tout problème, il y a une solution”(21). Elle trouvera bien des solutions, mais en 204 FRENCH REVIEW 91.4 Reviews 205 fin de compte, les problèmes à résoudre n’auront fait que se déplacer. Et entretemps, l’histoire aura connu des rebondissements dont le ressort est la situation de famille de Jean et de ses proches demeurés en Afrique. Jean est empêtré dans son passé et les promesses qu’il a faites au pays natal. Il n’est donc pas en...

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