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Reviews 239 plonger, à Charm el-Cheikh [...]. Il se tenait devant sa bière, un œil sur la céramique du comptoir, derrière, son esprit divaguait”(11). Daniel“avait un âge lointain, presque indéterminé vers le soir” (162). Petit à petit quelques détails émergent. Le hasard fait découvrir au narrateur un autre milieu, celui de la banlieue sud, quand il ramène à l’Ingénieur les documents qu’il avait oubliés au bar. Or, c’est samedi, le physicien est à Sceaux chez sa future fiancée, la Mathilde du titre. C’est un nouveau monde qui s’ouvre à lui, un milieu bourgeois différent de celui des prolétaires et des sans-papiers de la Porte de Clignancourt. Ici, se retrouvent amis et voisins, femmes et hommes, pour boire, manger, danser, festoyer, fumer, et fuir la solitude. Et le narrateur de philosopher, “elles ne tiennent à rien nos vies. La mienne aurait été différente si je n’étais pas passé [au bar] ce jour-là”(13). Les phrases sont saccadées comme la vie du jeune homme: “J’en avais marre d’être obligé de me laver en pièces détachées; des années en pièces détachées: prendre un bain à Paris!” (85). Éphémère parenthèse, les soirées prennent fin à l’approche du départ du couple aux États-Unis, puis le retour de l’Égyptien dans son pays. Esseulé des deux côtés du périphérique, sans amis et sans logis—expulsé de sa chambre de bonne—il est à nouveau orphelin et retourne vers ses tristes racines à Asnières: “Longtemps enfant, mon livre préféré a été Sans famille d’Hector Malot, à cause du titre qui m’allait bien”(161). D’autres lieux apparaissent— Suresnes, Saint-Lazare, Asnières, Rosny-sous-Bois—mais la solitude et l’isolement sont partout pareils, et les gens de plus en plus seuls même “dans leur voiture” (182). À la fin du parcours, comme Paris et sa banlieue qui “ne se connaissent même pas” et “ne se sont jamais fréquentés” (165), le narrateur et le lecteur se séparent sans s’être véritablement connus ni fréquentés. Auburn University (AL) Samia I. Spencer Gallois, Claire. Et si tu n’existais pas. Paris: Stock, 2016. ISBN 978-2-23-408124-6. Pp. 144. Proust affirme que “les vrais paradis sont les paradis qu’on a perdus”. Et si on retrouvait ce paradis-là? Claire Gallois raconte l’histoire d’un paradis (ses moments avec sa nourrice) qu’elle explore dans la vie d’abord et dans le récit ensuite. À la sortie de son livre, Gallois déclare qu’il est un hommage à sa nourrice Yaya. À son courage, sa dignité et sa résistance. Bien que le récit soit classé dans le genre romanesque, les circonstances rapportées convergent avec les détails de la notice autobiographique de l’auteure. Gallois décrit sa vie avec sa nourrice et sa mère biologique. Les contes décrivent souvent l’enfant confronté à une marâtre après la disparition de sa propre mère. Gallois vit une expérience inverse: Yaya est jouissive, elle raconte des contes et des légendes, et lui“apprend à écouter le silence”(85), alors que la mère néglige l’enfant et la met mal à l’aise (48). La première, quoique démunie, donne à l’enfant de “jolies pièces de 2 francs”, alors que la seconde est riche mais dénuée de générosité (56). Sous l’occupation allemande, Yaya sympathise avec les maquis alors que la famille de l’enfant soutient le régime de Vichy. Les séparations et les retrouvailles s’enchevêtrent. L’abandon de la petite fille par la mère à l’âge de deux mois est qualifié d’exemplaire (7) parce qu’il réunit l’enfant à Yaya. L’enlèvement à sa nourrice à six ans et les retrouvailles avec la mère sont vécus douloureusement. La narratrice part de chez ses parents“comme une voleuse, une bohémienne”(91). Des années plus tard, elle cherche Yaya “avec l...

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