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Reviewed by:
  • Principal de collège ou imam de la République? by Bernard Ravet
  • Samia I. Spencer
Ravet, Bernard. Principal de collège ou imam de la République? Kero, 2017. ISBN 978-2-36658-387-8. Pp. 236.

Dès la première phrase, l'ancien principal de "trois des collèges les plus 'difficiles' de l'académie d'Aix-Marseille" (9)—Monet, Versailles et Jean-Claude Izzo—sonne l'alarme: "Il y a urgence" (9). Le récit qui suit confirme que dans un poste en ZEP on "vieillit deux fois plus vite qu'ailleurs, [mais] j'allais découvrir qu'à Versailles on vieillissait quatre fois plus vite" (23). Les exemples sont innombrables, à commencer par une tentative d'homicide sur sa personne. Les coupables de l'attentat, tout comme ceux de l'incendie du gymnase quelques jours plus tôt ou les voleurs des ordinateurs flambant neufs peu après, ne seront jamais retrouvés. Pour expliquer le climat du collège et son environnement, l'auteur rappelle la transformation économique et [End Page 242] démographique des quartiers où il a exercé, autrefois peuplés de Corses et de petits commerçants, aujourd'hui remplacés surtout par des Comoriens et des Maghrébins dont les cultures sont très différentes. L'institution fonctionne comme "un camp de réfugiés, [où] une mission l'emporte sur toutes les autres: assurer la survie" (35). Son principal, le "directeur d'une ONG pédagogique" (48), confronte, entre autres, grossesse, viol, obscurantisme, fugue, délinquance, agression, vulgarité et communautarisme. Toutefois, son plus grand souci demeure la "tentative de prise de pouvoir, insidieuse, du religieux à l'intérieur du collège" (96–97), qui cherche à se substituer aux "valeurs communes, républicaines, laïques" (116). Devant les situations insolites et inattendues auxquelles il fait face, c'est avec bon sens, intelligence et humanité, soutenu par la police, le ministère de l'Intérieur, le Conseil général et les Renseignements généraux, que Ravet réussit à "bricoler des solutions pour tenir la mission—faire respecter la laïcité—tout en tenant compte du réel, et négocier des solutions de bric et de broc, sans autre soutien que celui des équipes" (86). Quant au rectorat ou à l'Éducation nationale, c'est "l'indifférence absolue" (96), tout comme le syndicat enseignant qui "se voile la face depuis trente ans" (208). Le ton monte et la colère aussi quand l'auteur pointe du doigt l'État et "le banal clientélisme" des politiques bienveillants "à l'endroit du religieux [...], une façon parmi d'autres d'aller à la pêche aux voix pour les prochaines élections" (207). Un des chapitres les plus lumineux est consacré aux valeurs et aux principes inculqués au jeune Ravet au sein de son modeste milieu familial, et au cours de sa scolarité et sa formation d'enseignant. Il y rappelle ses premières activités professionnelles quand dominait parmi les immigrés une volonté d'intégration et que l'adversaire était "la pauvreté, pas le religieux" (138). Aujourd'hui, qui se souvient encore de ce pan d'histoire sociale enseveli sous le poids d'une sombre actualité? Le présent document devrait être inclus dans le cursus de tous les programmes pédagogiques, plus particulièrement celui des Écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPS)—les successeurs des IUFM—afin d'alerter les futurs enseignants sur ce qui les attend sur le terrain, leur donner des idées pour contrer le désarroi et la confusion qu'ils ne manqueront pas d'affronter, et leur inspirer des dispositifs qu'ils pourraient "mettre en œuvre pour renverser la fatalité" (155).

Samia I. Spencer
Auburn University (AL), emerita
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